Tag: asie du sud

  • Les protestations contre l'expulsion de notre camarade Murugathas se développent

    L’appel à protester contre l’expulsion éventuelle du militant tamoul Murugathas a pu compter sur un large écho. Des dizaines de personnes ont envoyé des mails de protestation au secrétaire d’État à l’asile et à l’immigration afin de s’opposer à l’expulsion imminente d’un homme présent depuis 18 ans dans notre pays, qui y a une famille, et dont la vie sera en danger s’il est renvoyé au Sri Lanka. Parmi les différentes lettres de protestation se trouvent notamment celle d’un dirigeant syndical du Kazakhstan et celle de Paul Murphy, député européen irlandais. Depuis le centre de détention de Steenokkerzeel, Murugathas tient à chaleureusement remercier tous ceux qui le soutiennent.

    Par Geert Cool. Si vous voulez collaborer à cette campagne, n’hésitez pas à nous contacter via : tamil@socialisme.be

    Les expulsions de Tamouls très contestées en Grande-Bretagne

    Le choc qu’ont subi les parents, les amis et les camarades de Murugathas est très grand. Lui-même est d’ailleurs encore aujourd’hui très affecté par son arrestation. Une expulsion signifierait qu’il soit livré aux mains des autorités sri-lankaises, avec le risque qu’il soit torturé. Cette année, des Tamouls ont été expulsés du Royaume-Uni vers le Sri Lanka, et ils ont subi diverses violences dès leur arrivée.

    Le quotidien The Guardian a ainsi publié un article consacré au retour d’un réfugié tamoul (voir cet article). Ci-contre, vous pouvez voir une photo qui illustre ce qui est arrivé aux réfugiés tamouls qui sont retournés au Sri Lanka… Les choses sont allés tellement loin que des décisions judiciaires sont arrivées pour interdire de renvoyer les Tamouls au Sri Lanka (voir cet article du Guardian).

    L’oragnisation de défense des droits de l’Homme Human Rights Watch a également protesté contre les expulsions de Tamouls. Amnesty International souligne également les grands problèmes que rencontrent les droits de l’Homme au Sri Lanka. L’organisation ne croit pas aux vaines promesses du régime (voir cet article d’Amnesty International). Ces plaintes des organisations de défense des droits de l’Homme ont été renforcées par un rapport de l’ONU qui a admis que les Nations Unies ont été incapables de protéger la population civile au Sri Lanka et qui reconnaît explicitement que, même après la guerre civile, les droits de l’Homme ne sont pas respectés.

    Un large soutien et une grande solidarité

    Les messages de protestation ont afflué depuis le lancement de l’appel, de la part de militants politiques, de syndicalistes,… Parmi eux: Esenbek Ukteshbayev, l’une des figures parmi les plus proéminentes de la gauche syndicale au Kazakhstan, lui-même venant à peine de rentrer au pays après un exil forcé destiné à fuir la répression. Des protestations sont également venues d’Inde et de notre parti-frère New Socialist Alternative. Des e-mails de syndicalistes et de militants politiques sont aussi venus du Portugal, d’Italie, de France, des Pays-Bas, de Suède,… En Belgique, la pétition a été signée par des militants du PSL, de Rood!, de la LCR, du PTB, par des syndicalistes de la FGTB et de la CSC, ainsi que par des gens qui ne sont organisés nulle part.

    Le député européen Paul Murhpy (Socialist Party, notre parti-frère en république Irlandaise) a envoyé une lettre à la secrétaire d’État De Block. Il déclare entre autres: ”Je suis membre de la délégation du Parlement Européen qui discute des relation avec l’Asie du Sud, et notamment avec le Sri Lanka. J’ai rencontré Murugathas à plusieurs reprises dans la cadre de mon travail avec cette délégation. Je connais la situation du Sri Lanka de par mon travail avec la présente délégation ainsi que par de nombreux contacts que j’ai dans ce pays. Le rapport de l’ONU ‘Report of the secretary general’s internal review panel on UN action in Sri Lanka’ démontre que les Nations Unies n’ont pas pu protéger les civils dans les derniers mois de la guerre civile. De nombreuses preuves attestent de violations répétées des droits de l’Homme et du fait que les discriminations du gouvernement contre la minorité tamoule se poursuivent sans relâche depuis la fin de la guerre.” (La lettre de Paul Murphy est disponible ici (pdf)). La campagne se poursuivra dans les prochains jours. Lundi sera soumis le recours contre l’arrestation et l’expulsion de Murugathas. Des actions seront prévues. En attendant, nous vous demandons de continuer à faire connaître le cas de Murugathas, à faire signer la pétition et à envoyer les mails de protestation.


    Lettre de Paul Murphy

  • Les crimes de guerre du gouvernement srilankais et le tardif rapport des Nations-Unies

    Le rapport du groupe d’experts des Nations-Unies publié ce 25 avril après un délai considérable confirme l’analyse de Tamil Solidarity et d’autres organisations au sujet du massacre des Tamouls au Sri Lanka ces deux dernières années. Ce groupe d’experts avait été établi par le secrétaire général des Natons-Unies Ban Ki-Moon en juin 2010 afin de connaitre la situation au Sri Lanka.

    Écrit par TU Senan, pour Tamil Solidarity

    Le rapport confirme nos estimations selon lesquelles plus de 40 000 personnes ont été massacrées par l’armée srilankaise lors de la phase finale de la guerre qui s’est terminée en mai 2009. L’armée a constamment bombardé les hôpitaux, les écoles, les abris temporaires et les soi-disant “zones de cessez-le-feu”. L’ensemble des 400 000 réfugiés ont été ensuite déportés en masse vers des “camps de détention” sans aucune infrastructure. Toutes sortes de décès et abus scandaleux ont eu lieu au cours du transport et dans les camps. De nombreuses campagnes, y compris Tamil Solidarity et les médias tamouls, diffusent constamment de nouveaux rapports de ces horreurs.

    Toutefois, il ne faut pas avoir la moindre illusion dans le fait que ce rapport de l’ONU n’apporte le moindre changement dans les conditions des victimes au Sri Lanka. Le lendemain de sa publication, le journal britannique The Guardian rapportait que le secrétaire général de l’ONU «ne désire lancer une enquête internationale que si le gouvernement srilankais est d’accord, ou si un “forum international” tel que le Conseil de sécurité des Nations-Unies appelle à une telle enquête». Il est évident pour de nombreuses personnes que le gouvernement srilankais ne permettra pas la moindre enquête internationale. En fait, la publication de ce rapport tardif a elle-même été retardée par les protestations du gouvernement srilankais. Le ministre srilankais des Affaires extérieures, GL Peiris, a qualifié ce rapport d’“absurde” et “sans fondement”.

    Le président du Sri Lanka, Mahinda Rajapaksa, a appelé à une “démonstration de force” pour le Premier Mai, la journée internationale des travailleurs, pour «manifester contre l’injustice faite à notre pays» par ce rapport de l’ONU ! «Le Premier Mai ne devrait pas être confiné à exprimer la solidarité des travailleurs», disait Rajapaksa. Alors que le régime tente de récupérer à son compte la Fête du Travail pour ses propres intérêts chauvinistes, il accuse l’ONU d’être «récupérée par certains pays» ! Le gouvernement a aussi appelé tous les partis politiques du pays à exprimer leur opposition à ce rapport. Il cherche à détourner les critiques contre le gouvernement vers les “ennemis à l’étranger”. 

    En réponse à l’appel de Rajapaksa, le parti pseudo-marxiste qu’est le JVP (Janatha vimukthi peramuna – Front de libération populaire, un parti communautaire chauviniste pro-cingalais qui se prétend à tort “marxiste”) a attaqué les Nations-Unies pour leur ingérence dans les affaires internes du pays ! La véritable raison de l’opposition de ce parti au rapport de l’ONU provient du fait qu’il a soutenu le gouvernement pendant la guerre. Il a suivi le gouvernement dans chacun de ses pas tout au long de la guerre. Et il a été très rapide à appeler à ce que l’ex-général Sareth Fonseka, qui a dirigé la guerre, soit promu au rang de héros national.

    Le JVP tente parfois de donner une image “mixte”. Il donne l’impression de se battre contre les attaques sur les droits démocratiques, de se battre pour les droits des réfugiés tamouls et pour la liberté des médias. Il fait cela uniquement pour conserver un certain soutien parmi les étudiants et certains travailleurs, qu’il mobilise sur base de revendications économiques et sociales “radicales”. Mais en mélangeant ces revendications avec le nationalisme cingalais bouddhiste, il pousse ces couches encore un peu plus vers le régime Rajapaksa. Cette méthode erronnée a été démontrée de manière très claire par l’ampleur de leurs pertes électorales. Un appel doit être fait envers tous ces étudiants et travailleurs qui cherchent une direction, afin qu’ils rompent avec le JVP et qu’ils rejoignent une véritable riposte.

    Mais le JVP n’est pas le seul parti politique qui nie les affirmations des Nations-Unies. Certains membres du parti d’opposition capitaliste, l’UNP (Parti national uni), tels que P.E. Jayasuriya, déclarent encore que «Pas un civil tamoul innocent n’a été tué par l’armée durant la guerre, grâce à la bonne gestion du président Rajapaksa».

    L’ironie étant (si on peut parler d’ironie dans le contexte du Sri Lanka) que Jayasuriya est également un membre de l’association internationale des droits de l’Homme ! Le vice-président de l’UNP, Karu Jayasuriya, a aussi proclamé que le parti se rangera du côté des forces de sécurité, apportant encore plus de soutien au gouvernement quant à cette question.

    Le parti des moines bouddhistes fondamentalistes et racistes du JHU (Jathika hela urumaya – Parti du patrimoine national) fait “tout ce qu’il peut” pour soutenir le gouvernement. « Si Ban Ki-Moon et les Nations-Unies veulent mettre le président Rajapaksa sur la chaise électrique, il faudra alors qu’ils y mettent chacun de nous, les religieux en premier», disait le Vénérable Galagama Dhammaransi Thero, ajoutant que «Nous protégerons et bénirons toujours ce dirigeant courageux».

    Pendant ce temps, la Commission de réconciliation et des leçons apprises (LLRC) mise en place par le gouvernement a déclaré qu’elle ne commentera pas ce rapport ni ne prendra la moindre action le concernant. La LLRC est une fausse commission mise en place par le président, et elle agit conformément à ses attentes.

    Malgré la rhétorique anti-impérialiste utilisée par le gouvernement pour mobiliser le nationalisme cingalais, l’impérialisme occidental tout comme le régime srilankais sont bien conscients du caractère très limité des actions qui pourraient être entreprises à l’encontre du Sri Lanka.

    L’hypocrisie des Nations-Unies

    Malgré l’aveu du rapport lui-même selon lequel «au cours des dernières étapes de la guerre, les organes politiques des Nations-Unies ne sont pas parvenus à entreprendre la moindre action afin de prévenir la mort de civils», aucune “excuse” n’a été jusqu’ici faite par cette institution. À la place, l’ONU n’offre que l’inaction, encore et encore.

    De nombreux appels à l’action ont été émis durant la guerre début 2009, afin d’arrêter la guerre et d’empêcher le massacre en masse de la population tamoulophone. Samedi 31 janvier 2009, 100 000 personnes ont défilé à Londres en opposition à cette boucherie. Des centaines de milliers de Tamouls et d’autres sont descendus dans les rues partout dans le monde. Après la guerre, ces mouvements ont continué à émettre des revendications en faveur de véritables mesures humanitaires. Dans le silence et l’inaction de l’ONU et des autres gouvernements, une horreur et un massacre sans nom ont eu lieu. Et les abus et tueries se poursuivent aujourd’hui même. Ceci ne sera pas oublié.

    Avec ce rapport, les Nations-Unies tentent maintenant de se racheter quelque peu. Mais le fait reste que l’ONU n’a fait absolument aucune tentative pour empêcher la tuerie. Qui plus est, elle ne s’est même pas excusée pour avoir passé une résolution, à dix jours du début du massacre, qui consacrait l’innocence du gouvernement sri lankais. Cette résolution promulguée par le conseil des droits de l’Homme de l’ONU le 27 mai 2009 applaudissait la «conclusion des hostilités et la libération par leur gouvernement de dizaines de milliers de citoyens srilankais qui étaient tenus en ôtages contre leur volonté par les Tigres de libération de l’Eelam tamoul (LTTE), de même que les efforts effectués par le gouvernement afin d’assurer la sécurité de tous les Sri Lankais et d’apporter une paix permanente aux pays».

    Cette résolution du 27 mai 2009 ne contient pas la moindre critique du gouvernement srilankais. Celle-ci va même encore plus loin politiquement : «Nous réaffirmons le respect pour la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’indépendance du Sri Lanka et pour son droit souverain à protéger ses citoyens et combattre le terrorisme».

    En fait, la seule condamnation du rapport a été faite à l’encontre des LTTE pour avoir lancé «des attaques contre la population civile» et «utilisé des civils en tant que boucliers humains». Le récent rapport d’experts n’a pas dénoncé ni d’ailleurs fait la moindre référence à cette résolution. Il ne fait que demander au conseil des droits de l’Homme de “reconsidérer leur position” ! L’hypocrisie des Nations-Unies, comme l’a fait remarquer le professeur Noam Chomsky, «a été si profonde qu’elle en était étouffante».

    On serait en droit d’espérer que ce rapport pourrait être considéré par tous les gouvernements et organes gouvernementaux comme une base minimale avant d’entamer toute relation avec le gouvernement srilankais, ou qu’il puisse servir de base à une enquête internationale quant aux crimes de guerre. Toutefois, nous ne constaterons sans doute aucune action de ce type.

    Bien que l’ONU donne l’illusion d’agir en tant qu’organisation indépendante, il serait naïf d’imaginer que l’ONU entreprenne la moindre action qui aille à l’encontre des intérêts de ses constituants majeurs : les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Inde, la Chine et la Russie. Cet organe n’est pas indépendant d’aucune manière que ce soit. Il n’a pas non plus la moindre crédibilité dans le fait d’empêcher des massacres de se dérouler dans d’autres régions du monde. Les Nations-Unies n’ont pas empêché le massacre au Congo par exemple. Au Rwanda, les puissances mondiales ont observé sans broncher le génocide d’un million de gens en quelques mois.

    Les Nations-Unis se placent systématiquement du côté des impérialistes. Lorsqu’elles ne le font pas, leurs actions sont bloquées par les grandes puissances qui peuvent exercer un pouvoir de véto sur leurs activités. Les masses opprimées n’ont aucune voix qui représentent leurs intérêts lors des prises de décision par l’ONU.

    Le Conseil de sécurité de l’ONU est composé de pays tels que la Russie, la Chine et l’Inde, qui ont non seulement financé l’armée gouvernementale sri lankaise, mais continuent à la protéger. Après que le rapport ait été publié, le secrétaire d’État à la défense Gotabayah Rajapaksa a annoncé que le Sri Lanka «devra chercher la protection de la Russie et la Chine».

    Les actions de ces gouvernements sont une extension de la manière dont ils traitent leur propre population. Ils n’accordent absolument aucun intérêt aux droits de l’Homme. Le rôle brutal de l’Inde au Cachemire et dans d’autre partis du pays est bien connu. Aucun gouvernement indien n’a jamais prêté la moindre attention à la décision des Nations-Unies d’organiser un référendum au Cachemire quant à son indépendance. Il existe beaucoup de documentation quant au massacre d’ethnies entières et de militants en leur faveur par le gouvernement indien au nom de la fameuse “opération green hunt” (récente campagne anti-terroriste lancée par l’État indien contre les milices naxalites organisées notamment par le Parti communiste d’Inde (maoïste) dans le “couloir rouge” formé par dix provinces – constituant ensemble 40% de la superficie de l’Inde – de l’est du pays –– NDT).

    D’une même manière, le rôle du gouvernement russe en Tchétchénie et les maltraitances infligées par le gouvernement chinois à la population tibétaine et dans le reste de leurs pays sont tristement célèbres dans le monde entier. Ces États, qui méprisent les droits des masses de leur propre pays, n’ont pas le moindre scrupule à collaborer avec d’autres gouvernements qui commettent des crimes de guerre, tel que le régime Rajapaksa.

    Les Nations-Unies et les intérêts impérialistes

    Le gouvernement srilankais dépend de plus en plus du soutien de la Chine, de l’Inde, et des “États voyoux” tels que l’Arabie saoudite. Cet état de fait entre en conflit avec les intérêts de l’impérialisme occidental en Asie du sud. L’impérialisme occidental pourrait utiliser le rapport des Nations-Unies en tant que levier pour réétablir son influence dans la région.

    Cependant, il y a une limite que l’Occident n’est pas prête à dépasser. Nous ne devrions pas sur-estimer le fait que ceci le mènera à défendre les intérêts des masses opprimées, ni à exiger le droit à l’auto-détermination ou toute autre solution politique.

    Parmi la gauche traditionnelle en Inde, certains affirment que les rivalités inter-impérialistes peuvent être utilisées pour faire progresser les intérêts des opprimés. Cependant, sans une forte organisation indépendante des masses laborieuses et pauvres, une telle stratégie risque de faire tomber ceux qui désirent riposter dans le piège des impérialistes.

    Nous avons vu comment les impérialistes se “liguent” bien souvent contre les intérêts des masses opprimées, malgré leurs différences. Les États indien et pakistanais, par exemple, ont mené ensemble campagne contre toute critique pouvant menacer le gouvernement srilankais. Bien que le Sri Lanka ne possède pas l’énorme manne pétrolière de la Libye – une des principales raisons derrière l’intervention de l’impérialisme occidental dans ce pays – sa position stratégique, y compris sa valeur aux yeux des ambitions régionales chinoises, le rend important pour les puissances occidentales. Les mesures mises en œuvre par les impérialistes au Moyen-Orient après que la vague révolutionnaire ait commencé à s’y répandre constituent à cet égard une bonne leçon.

    La soi-disant “intervention humanitaire” en Libye n’est qu’une tentative de briser la vague révolutionnaire au Moyen-Orient, avec l’intention de regagner le contrôle sur les ressources naturelles. Kadhafi est pour eux un partenaire peu fiable, au contraire des régimes du Bahreïn et d’Arabie saoudite. Aucune action n’a été entreprise à l’encontre de ces régimes, malgré le fait que ces États ont utilisé la même violence meurtrière contre les manifestants pro-démocratie.

    Le secrétaire aux affaires étrangères britannique, William Hague, en défendant sa visite en Syrie malgré les tueries qui y sont organisées contre les masses révoltées, a insisté sur le fait que son gouvernement est sur le point de conclure un “deal” avec le gouvernement syrien et le président Bashar al-Assad. Assad est considéré comme un “réformateur” potentiel. Ceci est en complète contradiction avec les intérêts des masses syriennes, qui exigent le renversement du régime Assad.

    En outre, le rôle des puissances occidentales en Libye a été encore plus discrédité par leur rôle dans le massacre de millions de simples citoyens en Irak. Le rôle contradictoire des soi-disant “préoccupations humanitaires” dans la région démasque clairement les intérêts impérialistes des gouvernements occidentaux.

    L’idée selon laquelle les masses opprimées devraient d’une manière ou d’une autre accorder leur soutien à l’intervention de l’impérialisme occidental en Libye – censé empêcher le “massacre potentiel” – est absolument erronnée. Le régime égyptien, qui a lui aussi voté le soutien à la résolution de mai 2009 sur le Sri Lanka, a été balayé par le mouvement de masse historique du peuple égyptien. C’est un mouvement comme cela, avec une telle confiance en soi, qui pourrait mettre un terme définitif à des régimes tels que celui de Kadhafi.

    L’intervention impérialiste est une autre raison pour laquelle la révolution, qui est partie de Tunisie pour se propager à l’Égypte puis à Benghazi, n’a jusqu’ici pas eu le même impact à Tripoli. Kadhafi a été capable de mobiliser un certain soutien, non pas basé sur la loyauté tribale, mais aussi sur l’antagonisme anti-impérialiste des masses. La seule chose qui peut prévenir le massacre et sauver la révolution est l’action des masses unies à Tripoli, une fois qu’elles auront assez de confiance pour se dresser contre Kadhafi. La soi-disant intervention humanitaire de l’impérialisme est tout sauf ça. Qui plus est, elle a déjà causé énormément de morts.

    Le régime du Sri Lanka tente de même de se baser sur l’antagonisme anti-impérialiste qui vit parmi les masses. L’ex ambassadeur sri lankais aux Nations-Unies, Dayan Jayatilleka, a attaqué les puissances impérialistes occidentales lors de la onzième session spéciale à l’UNHCR en mai 2009, afin de s’attirer un soi-disant soutien “anti-impérialiste” : «Ces gens sont les mêmes qui ont certifié que l’Irak détenait des armes de destruction massive. Je ne leur ferais pas confiance pour acheter une voiture d’occasion, encore moins en ce qui concernerait de prétendus “crimes de guerre” !» Même ce fidèle laquais a été viré par le président un peu plus tard sous le prétexte d’avoir défendu la “régionalisation” dans un journal local. Le secrétaire à la défense Gotabhaya Rajapaksa a été encore plus loin dans son “analyse”, annonçant : «Ils sont jaloux, parce qu’eux n’ont pas été capables de vaincre le terrorisme comme nous l’avons fait». Un autre loyal serviteur du régime sri lankais, et prétendu expert mondial en terrorisme, le Professeur Rohan Gunaratna, fait remarquer que : «En Irak et en Afghanistan, où plus d’un million de civils ont été tués, il n’y a pas de comité d’experts qui conseillet au secrétaire général de l’ONU de mener une enquête sur les crimes de guerre».

    Le régime utilise l’hypocrisie des Nations-Unies et de l’impérialisme à son avantage, tout comme le régime Kadhafi en Libye. Nous aussi, nous nous opposons fermement aux non-respect des droits de l’Homme et à leur exploitation par les puissances occidentales, mais nous devons aussi étaler au grand jour l’hypocrisie qui se trouve derrière la pseudo-rhétorique “anti-impérialiste” du régime srilankais.

    Malgré sa rhétorique, le régime sri lankais est toujours aussi coopératif vis à vis des puissances impérialistes tant régionales qu’occidentales. Le débat autour des “droits de l’Homme” est en partie dû à la concurrence entre les puissances régionales, comme la Chine et l’Inde, et les puissances occidentales qui cherchent à établir des conditions favorables afin d’obtenir un avantage sur le plan économique. Le FMI et la Banque mondiale ont donné leur plein accord concernant les prêts au gouvernement srilankais, et ont érigé le Sri Lanka au rang de “paradis pour les investisseurs”. Le gouvernement srilankais mène en ce moment une politique brutale de privatisations, attaques sur les pensions et soi-disant réformes fiscales, telle que dictée par le FMI. La pseudo rhétorique anti-impérialiste du régime Rajapaksa et son exaltation du nationalisme cingalais ont également pour but de détourner l’attention des masses laborieuses et pauvres des attaques brutales menées par Rajapaksa sur leurs conditions de vie et sur les services.

    En outre, nous ne verrons pas l’annualtion des prêts du FMI ou de la Banque mondiale sur base d’un scandale de “crimes de guerre”. Même après la fuite du rapport du comité d’experts de l’ONU dans les médias, les congressistes américains ont continués à voter en faveur d’un “renforcement des liens entre le Sri Lanka et les États-Unis”. Le nouveau vice-président de la commission Sri Lanka du Congrès américain, Chris Van Hollen, qui est aussi un Démocrate, et qui défend les coupes budgétaires d’Obama, appelle l’ensemble de ses collègues à soutenir cet appel. En d’autres termes, l’impact de ce rapport pour le sauvetage des masses opprimées sera en réalité extrêmement minimal.

    Le secrétaire assistant américain Robert Blake, qui a visité le Sri Lanka après que le rapport de l’ONU ait été publié, a donné son soutien indéfectible au gouvernement. Il a félicité le “progrès positif” et a affirmé que la LLRC (Commission pour la réconciliation et les leçons apprises, qui est fort critiquée dans le rapport de l’ONU) joue un “rôle important”. Dans une déclaration publiée le 4 mai, M. Blake dit que «Lors de mes rencontres officielles aujourd’hui, j’ai assuré au gouvernement sri lankais du fait que les États-Unis s’engagent à un partenariat fort et à long terme avec le Sri Lanka, et que des rumeurs concernant notre soutien à un “changement de régime” n’ont pas le moindre fondement. J’ai exprimé notre soutien pour les efforts du gouvernement visant à relever le pays après cette guerre civile dévastatrice, et ai encouragé de nouveaux pas en direction de la réconciliation et d’un Sri Lanka paisible, démocratique et uni». Il y a une très brève mention du rapport des Nations-Unies, dans laquelle il affirme que ce rapport souligne l’importance d’une “solution politique capable de forger un Sri Lanka uni”, et l’importance du “dialogue avec les Nations-Unies” de la part du Sri Lanka ! Voilà bien le genre de comportement hypocrite auquel nous devons nous attendre de la part des puissances impérialistes !

    L’attaque sur la diaspora, et l’absence de solution politique

    Parmi les cinq raisons citées par le rapport de l’ONU en tant qu’“obstacles à la reconnaissance”, on retrouve le “rôle de la diaspora tamoule” : «Certains ont refusé d’admettre le rôle des LTTE dans le désastre humanitaire dans le Vanni (la région du Nord du Sri Lanka), ce qui crée un obstacle supplémentaire sur le chemin de la reconnaissance et de la paix durable».

    Il ne fait aucun doute que les Tamouls de la diaspora ont été les plus virulents à crier contre le massacre qui a lieu au Sri Lanka, tandis que les gouvernements de tous les autres pays ont préféré gardé le silence.

    Des centaines de milliers de personnes sont descendues dans les rues pour y clamer leur dégout. L’inaction de la part des organes gouvernementaux occidentaux et internationaux a radicalisé un grand nombre de gens, surtout parmi les jeunes.

    Il n’est pas exagéré de dire que les jeunes Tamouls de la diaspora sont plus politisés aujourd’hui que pendant les trente années qu’a duré la guerre civile. De nouvelles vagues de jeunes se sont impliquées dans des activités politiques. Cette politicisation a eu pour conséquence la création de toute une série d’organisations de jeunes.

    Tamil Solidarity désire rassembler le plus grand nombre possible de ces jeunes afin de mener une riposte de principe contre le régime chauviniste sri lankais, et appelle à une lutte unie avec l’ensemble des masses opprimées.

    Cette politicisation n’est certainement pas un résultat favorable ni pour l’impérialisme occidental, ni pour le régime srilankais. Ces gens préfèrent les “diplomates” qui restent contrôlables, ceux qui vont faire en sorte que la société reste passive dans leurs intérêts, non pas la jeunesse qui se rebelle de colère contre l’injustice. Pendant la guerre, les ministres et députés du gouvernement Labour au Royaume-Uni ont fait toutes sortes de promesses dans une tentative de racheter la jeunesse révoltée pour pouvoir la contrôler. Ils n’ont tenu aucune de leurs promesses.

    Les establishments sentent un “danger” dans la direction que pourrait prendre ce mouvement des jeunes de la diaspora. Les jeunes tirent la conclusion assez correcte du fait que l’attaque sur les Tamouls opprimés fait partie d’une lutte contre l’ensemle des masses opprimées. De plus en plus de jeunes participent de manière active à la politique locale de leurs pays respectifs contre les injustices, contre le racisme, contre les attaques sur les minorités, contre le chômage des jeunes, et contre les attaques sur les services publics.

    En outre, il y a aussi une insistance naissante pour plus de démocratie, la nécessité de travailler avec les syndicats, les organisations de gauche et d’autres mouvements qui mènent campagne pour les droits et contre l’oppression.

    L’establishment veut saper ce processus. Il souhaite pacifier et faire dérailler cette colère, car il comprend que cette rage est de plus en plus dirigée contre lui. Et il veut pousser ces jeunes vers la droite du spectre politique.

    Le fait d’accuser la diaspora de garder le silence sur les crimes supposés des LTTE est, à ce stade, une des manières par lesquelles ils veulent atteindre leurs buts. Ils cherchent à propager un total rejet des idées des LTTE par la diaspora, et s’attendent à sa coopération dans le cadre du “développement et de la réconciliation” pour un Sri Lanka uni.

    De solides groupes militants tels que Tamil Solidarity, tout en s’opposant fermement au régime srilankais, ont toujours remis en cause les méthodes utilisées par les LTTE. Nous avons attentivement expliqué les raisons pour lesquelles les LTTE ont été vaincus. Un des principaux échecs des Tigres a été leur absence d’un appel à l’ensemble des masses en lutte dans le sud du Sri Lanka, dans le Tamil Nadu (la province tamoule du sud de l’Inde, qui compte 70 millions d’habitants, y compris plusieurs grandes villes telles que Chennai (anc. Madras) – à titre de comparaison, le Sri Lanka compte 20 millions d’habitants, dont 2 millions de Tamouls –– NDT) et dans le monde.

    Nous avons aussi critiqué les LTTE en ce qui concerne les tueries internes, les attaques contre la population musulmane (il y a 1 million de musulmans au Sri Lanka –– NDT) , et l’exécution de civils au cours de la dernière phase de la guerre. La majorité de la couche active de la diaspora ne nie pas ces faits non plus.

    Cette analyse est importante, pas seulement pour critiquer les LTTE, mais pour pouvoir avancer dans la lutte. Cela représente une étape cruciale dans la définition d’une stratégie pour la prochaine étape de la lutte. C’est là une chose complètement différente de l’agenda des Nations-Unies qui se cache derrière son attaque sur les LTTE.

    L’idée que la diaspora désire d’une certaine manière promouvoir le terrorisme est entièrement fausse. Toutefois, confrontés à l’immense violence contre la population tamoulophone du Sri Lanka, la première réponse de la jeunesse tamoule ne sera pas dirigée contre la direction des LTTE, dont tous les membres ont été assassinés par le gouvernement du pays. Au lieu de ça, ils vont certainement concentrer leur colère sur le gouvernement criminel du Sri Lanka et sur l’establishment occidental qui garde toujours le silence.

    Dire à la diaspora que son premier rôle est de dénoncer les LTTE, revient à paver la voie pour la coopération des Tamouls avec l’État srilankais. Une telle collaboration pourrait ne pas se faire avec le gouvernement actuel qui est directement responsable du génocide, mais pourrait être organisée avec de futurs gouvernements srilankais avec lesquels l’Occident espérera pouvoir faire de bonnes affaires. En même temps, il est important pour les Tamouls de la diaspora de se distancier des erreurs faites par les LTTE, afin de ne laisser aucun espace à des organes droitiers tels que les Nations-Unies pour attaquer les campagnes de la diaspora.

    Il suffit d’une simple compréhension du rôle de l’impérialisme et de la manière de lui résister. Construire une organisation sérieuse et indépendante, qui se batte sans aucun compromis pour les droits de masses opprimées, est la clé pour mener la lutte plus en avant. Ceci devrait se faire sur base non seulement d’une opposition au gouvernement Rajapaksa et à ses laquais, mais aussi sur base d’une opposition à toute forme d’oppression. Une fine compréhension des diverses forces de classe en action dans la société est requise afin de bâtir un mouvement capable d’amener un changement fondamental.

    Ce mouvement peut être construit en regroupant les militants progressistes, les syndicalistes et les socialistes. Mais ce ne sera pas une tâche facile, car de sérieux obstacles doivent être surmontés avant que la confiance des masses puisse être gagnée. La trahison de l’ancienne organisations des masses opprimées autrefois si puissante, le Lanka Sama Samaja Party (LSSP – Parti srilankais pour l’égalité sociale, ex-membre de la Quatrième internationale, et ancien parti ouvrier de masse, qui dispose aujourd’hui d’un siège au parlement srilankais dans le cadre d’une coalition avec le parti de Rajapaksa –– NDT), est toujours fraiche dans la conscience des masses ouvrières du Sri Lanka.

    C’est la décision du LSSP de rejoindre le gouvernement de droite en 1964, puis de refuser le droit des minorités dans la constitution de 1972, qui a créé les conditions pour l’afaiblissement de la classe ouvrière et une hausse des tensions ethniques. La force de la classe ouvrière avait été constamment attaquée par les gouvernemens de droite qui se sont succédé. Aujourd’hui, l’épave de ce qui reste du LSSP se trouve maintenant au gouvernement, et joue le rôle de couvrir ses crimes de guerre.

    De même, la trahison des partis tamouls ne sera pas oubliée non plus. En l’absence d’une véritable organisation de masse indépendante des travailleurs et des pauvers, des partis tels que le JVP se sont embourbés de plus en plus, en mêlant marxisme et rhétorique anti-establishment, avec chauvinisme et nationalisme cingalais et bouddhiste.

    Sur une telle toile de fond, il pourrait sembler impossible de regagner la confiance des masses afin de construire un mouvement combatif. Cependant, la reconstruction d’un tel mouvement est la seule manière de mettre un terme à l’oppression, à l’exploitation et à la guerre. En outre, il existe de véritables forces dans le sud du pays qui se positionnent toujours fermement du côté des masses opprimées. Le Parti socialiste uni, par exemple, n’a jamais reculé dans sa lutte cohérente contre les divers et brutaux gouvernements srilankais. Il n’a jamais non plus hésité dans son soutien pour le droit à l’auto-détermination des masses tamoulophones. Pendant la guerre, les membres de l’USP ont risqué leurs vies et ont mené une campagne virulente afin de mettre un terme à la guerre, dont a notamment beaucoup parlé dans les médias du Tamil Nadu en Inde.

    Nous devons rassembler nos forces dans une telle organisation, et renforcer notre riposte. Nous devons aussi lancer un appel à l’ensemble des masses opprimées de l’Inde, et en particulier au Tamil Nadu, afin qu’elles nous rejoignent.

    Il serait stupide de placer le moindre espoir dans le gouvernement srilankais, ni dans toute autre puissance extérieure, pour nous fournir une solution. Les attaques contre les minorités au Sri Lanka n’ont jamais été aussi intenses, et le gouvernement actuel a complètement mis de côté tout effort envers une solution politique.

    Le président a notamment déclaré que : «Il n’y a pas de minorités dans ce pays». Ni les Nations-Unies, ni aucune puissance étatique ne propose non plus la moindre solution politique. Pour de telles puissances, le droit à l’auto-détermination est hors de question.

    Certains ont même émis l’idée comme quoi le fait de nous opposer à l’impérialisme pourrait nous faire perdre le soutien de la soi-disant “communauté internationale”, des gouvernements occidentaux. Mais, sur le long terme, les masses opprimées ne vont rien gagner du tout en s’alliant avec ces oppresseurs. Au contraire, elles ont beaucoup à perdre – le soutien de tous ceux qui se battent contre eux –, et ils ne faut pas leur faire confiance pour faire quoi que ce soit qui ne rentre pas dans le cadre des intérêts de leurs propres classes capitalistes.

    Par exemple, le peuple tamoul ne peut pas appeler le parti conservateur britannique (Tory) un allié, sur base d’un quelconque discours sur les droits de l’Homme fait par un de ses députés. Ceci représenterait une trahison aux yeux des millions de travailleurs au Royaume-Uni, de toutes origines, qui sont confrontés à un véritable bombardement d’attaques constantes sur les emplois, sur les services publics (comme la santé ou l’éducation) et sur les allocations de la part du gouvernement de coalition Tory/libéral-démocrate.

    En s’associant avec un tel parti anti-travailleurs, les Tamouls non seulement perdraient le soutien potentiel de ceux qui se battent contre ces coupes budgétaires, mais trahiraient également les masses tamoules en leur donnant un faux espoir dans ces politiciens.

    En fait, l’approche pro-monde des affaires des Tories est totalement opposée au moindre soutien à toute forme de riposte par les pauvres et par les travailleurs. Leur intérêt est purement avec les patrons et les hommes d’affaires qui cherchent à cacher le massacre qui s’est produit au Sri Lanka, et au lieu de cela, à promouvoir la création de zones de libre échange dans le Nord. Ces zones seront des sites d’exploitation intensive de la jeunesse tamoulophone. Rajapaksa a déjà promis une “main d’œuvre bon marché” en tant que moyen de “réhabilitation” des ex-Tigres ! La question des alliances est donc cruciale. Nous devons nous allier avec ceux qui se battent réellement contre l’inégalité et contre l’exploitation.

    Au milieu de la crise économique monidale et des pénuries alimentaires, la lutte contre les autres gouvernements qui appliquent des coupes similaires dans les emplois et dans les services publics s’est accrue en Europe et au-delà.

    À Londres, plus d’un demi-million de travailleurs ont défilé le 26 mars contre le gouvernement Con-Dem. Au Portugal et en Espagne, des centaines de milliers de gens ont manifesté pour les mêmes raisons. Des batailles de classe massives se déroulent en Grèce. Ces gouvernements, tout en attaquant les services publics, tentent aussi de fomenter le racisme et d’autres divisions dans ces pays. On voit la tentative de montrer du doigt les immigrants, sur base de la pression sur les services et les emplois limités, dans l’espoir d’en faire des boucs émissaires. Si le blâme pour les coupes budgétaires est dirigé à d’autres sections de la classe ouvrière et des pauvres, cela permet aux gouvernements de continuer leur politique au service des intérêts des riches et des grands patrons.

    Il y a un processus similaire au Sri Lanka, où le gouvernement a tenté de détourner l’attention et de diviser l’opposition par le biais du nationalisme cingalais, afin de pouvoir mettre en place sa politique brutale.

    Nous, les travailleurs, les minorités ethniques, les jeunes et les pauvres, portons le fardeau de ces attaques. En tant que minorités dans ces pays, les Tamouls sont aussi la cible du racisme et d’autres formes d’abus qui sont exacerbés par les partis de droite et les médias. Il nous faut répondre à ces attaques.

    Que chacun sache que où que nous soyons, nous nous dresserons contre l’oppression sous toutes ses formes, et riposterons. Cette riposte sera encore plus renforcée si nous nous faisons cause commune avec les luttes qui se déroulent en ce moment à travers toute l’Europe.

    Aucun droit ne peut être obtenu sans une lutte. Ainsi, le fait que les jeunes rejoignent les marches antiracistes et les manifestations de travailleurs au Royaume-Uni et en Belgique, est un développement significatif. Le fait que les Tamoulophones aient rejoint les action du Premier Mai à travers toute l’Europe est également un important pas en avant. Et c’est une telle solidarité et unité qui sème la panique dans le cœur des oppresseurs, au Sri Lanka comme ailleurs.

    S’unir pour riposter

    On peut comprendre que les Tamouls au Sri Lanka attendent contre tout espoir que le rapport de l’ONU puisse constituer un pas en avant dans le soutien à la lutte pour leurs droits.

    On peut comprendre que certains pauvres tamouls au Sri Lanka espèrent qu’une “force extérieure” leur vienne en aide. Mais il est inutile de créer des illusions dans le seul but de fournir un réconfort temporaire. Cependant, Tamil Solidarity exigera des Nations-Unies qu’elles prennent au moins quelques mesures afin que soient mises en vigueur les recommendations détaillées dans ce rapport. Si l’ONU s’avère incapable d’entreprendre la moindre action sérieuse contre le gouvernement srilankais, son hypocrisie n’en sera que plus dévoilée.

    Mais l’Alliance nationale tamoule (TNA) tente d’utiliser les attentes de la population tamoulophone pour se créer une base électorale. Elle fait cela en créant l’espoir que les Nations-Unies, voire l’Inde, peuvent apporter leur aide. Elle tente aussi de cacher le rôle crucial qu’a joué l’Inde dans la guerre. Il est important de rappeler que le gouvernement srilankais n’aurait pas pu gagner la guerre sans le soutien de l’Inde et de la Chine.

    Le fait que le gouvernement indien refuse de faire la moindre critique à l’encontre du régime srilankais actuel, même après avoir accepté le fait qu’un massacre de masse se soit déroulé pendant la guerre, ne devrait pas nous surprendre. Il serait criminel de la part de la TNA de créer des illusions en faveur des mêmes forces qui ont joué un rôle dans le massacre de masse des Tamouls, et qui persévèrent en ce moment dans leur politique d’exploitation des victimes.

    La TNA, tout en devenant de plus en plus “amicale” envers le régime meurtrier actuel, sous l’argument risible qu’elle n’a pas d’autre choix, refuse de chercher un allié parmi les forces qui continuent à se battre pour les droits de la population tamoulophone.

    La TNA est clairement en train de suivre la voie déjà empruntée par son prédécesseur, le Front uni de libération des Tamouls (TULF), qui avait pour habitude de baratiner les Tamouls dans ses zones d’implantation afin de gagner des votes, en même temps qu’il était main dans la main avec les oppresseurs au parlement. C’est là une des raisons qui ont fini par pousser la jeunesse tamoule à prendre les armes.

    Les jeunes et les militants du Sri Lanka doivent rompre avec ce genre de politique trompeuse. Ils doivent rejoindre les véritables combattants et militants dans leur pays. Il y a beaucoup à gagner pour les masses opprimées qui s’opposeront au gouvernement sur diverses plateformes, bien plus qu’en jouant le jeu des “négociations” qui ne mèneront à rien.

    Il y a des journalistes, des militants et de véritables gens de gauche dans le pays qui continuent à se battre pour le droit à l’auto-détermination des masses tamoulophones. Depuis la fin de la guerre, ils se sont vus contraints de dénoncer la loi d’urgence et l’Acte de prévention du terrorisme.

    Le gouvernement prétend avoir gagné la guerre contre le “terrorisme”, mais n’a pas abrogé ces lois draconiennes. Ces campagnes doivent être renforcées. Il faut aussi soutenir l’ensemble des forces qui se battent avec courage pour la liberté des médias et pour les droits démocratiques, et cela même au péril de leurs vies.

    Plus important encore, nous devons nous opposer à la création des zones de libre échange promises par le régime aux gouvernements indien, chinois et occidentaux. Ces zones ne seront pas les centres de soi-disant “réhabilitation” tels que le régime cherche à les faire passer. Elles seront au contraire des centres d’exploitation intensive, où les victimes de la guerre et les ex-membres des LTTE seront forcés de travailler pour le plus bas salaire possible.

    La reconstruction de syndicats puissants est urgemment requise en tant que meilleure opposition capable de s’opposer à ces conditions cruelles. De telles organisations ouvrières pourraient aussi remettre en question dans les faits les conditions inhumains et les bas salaires qui existent déjà à l’heure actuelle. La hausse rapide des prix de la nourriture, par exemple, constituera un autre “détonateur” pour un mouvement de masse contre le gouvernement, tout comme en Tunisie.

    Les “négociations” et la “coopération” avec les oppresseurs ne rapporteront jamais le moindre résultat aux pauvres et aux opprimés. Pour défendre nos droits et en gagner de nouveaux, la tâche urgente est de construire des partis indépendants des travailleurs et des pauvres, et des syndicats puissants et démocratiques.

  • Iran 1978-79: Une révolution volée à la classe ouvrière

    Pour comprendre la situation actuelle en Iran, il est important de savoir comment ce régime est arrivé au pouvoir. Le mouvement révolutionnaire iranien de 1978-79 a constitué une force puissante que personne n’attendait et qui a réussi à mettre fin au régime dictatorial et particulièrement répressif du Chah, monarque absolu pro-occidental. La classe ouvrière s’était soulevée, mais faute de direction politique claire, la révolution a été volée aux travailleurs par les forces religieuses conservatrices groupées autour de l’Ayatollah Khomeini, le prédécesseur de Khameini. Revenir sur les évènements révolutionnaires de 1978-79 est aussi d’un immense intérêt pour le mouvement actuel.

    Par Robin Clapp

    Aujourd’hui, l’Iran est une dictature religieuse mais, il y a maintenant 30 ans, un mouvement révolutionnaire de la classe ouvrière a renversé la monarchie iranienne et aurait pu aller jusqu’à l’instauration d’une république socialiste.

    Robin Clapp (CIO-Angleterre et Pays de Galles) parcourt ici ces évènements et explique pourquoi la contre-révolution a été victorieuse (texte écrit en 2003)

    Quand les experts de la CIA ont rédigé un rapport sur la santé politique du régime monarchiste et pro-occidental iranien e septembre 1978, ils ont conclu qu’en dépit de son régime autocratique, le Chah d’Iran régnait sur une dynastie stable dont le pouvoir pouvait encore s’étendre sur au moins une autre décennie. Quatre mois plus tard seulement, le Chah était toutefois forcé de prendre la poudre d’escampette face à une révolution populaire qui a mis bas un des régimes les vicieux au monde…

    La SAVAK, la police secrète du Chah, forte de 65.000 personnes, avait infiltré chaque couche de la société, avec des méthodes empruntées à la sinistre Gestapo nazie. Ces méthodes avaient d’ailleurs été ‘améliorées’ à tel point que le dictateur chilien Augusto Pinochet avait envoyé ses tortionnaires se former à Téhéran. Mais malgré ces colossaux obstacles, les travailleurs ont renversé le Chah et ont mis en branle un processus révolutionnaire qui a terrifié tant les régimes réactionnaires du Moyen-Orient que les puissances impérialistes occidentales. De plus, et ce n’est pas le moindre, ce soulèvement populaire a également alarmé la bureaucratie stalinienne d’Union Soviétique, alors engagée dans un commerce lucratif avec l’Iran.

    Hélas, au final, les travailleurs ne devaient pas pouvoir profiter des fruits de leur révolution. Le pouvoir est passé des mains du Chah à celles des de l’Islam politique de droite dirigé par l’Ayatollah Khomeini.

    Trois ans après, toutes les lois laïques avaient été annulées et les femmes s’étaient vues imposées des codes vestimentaires tirés d’une interprétation stricte de la tradition islamique. 60.000 professeurs ont à ce moment été renvoyés et des milliers d’opposants défendant les intérêts de la classe ouvrière ont été assassinés ou emprisonnés. Le parti communiste iranien, le Toudeh (Parti des Masses d’Iran), qui avait acceuilli avec enthousiasme le retour d’exil de Khomeini en 1979, a lui-même été interdit en 1983.

    une atmosphère révolutionnaire

    Un régime totalitaire se maintient par la terreur et l’oppression, mais cela ne fonctionne que tant que les masses demeurent effrayées et inertes. Mais l’horreur éprouvée quotidiennement conduit en définitive à la révolte. Une fois que la classe ouvrière laisse sa peur du régime de côté et entre en action, la police secrète et toutes ses effroyables méthodes s’avèrent souvent impuissants.

    Entre octobre 1977 et février 1978, des manifestations de masse illégales ont déferlé sur l’Iran. Revendiquant des droits démocratiques et leur part de la richesse du pays, les étudiants, puis la classe ouvrière, ont bravé les balles et la répression en occupant les rues.

    En janvier 1978, après que des tirs mortels aient touché plusieurs centaines de manifestants dans la Ville Sainte de Qom, une grève de deux millions de travailleurs s’est étendue de Téhéran à Isphahan, Chiraz et Mashad. Les pancartes tenues par les manifestants et les grévistes clamaient: «Vengeance contre le Chah et ses amis impérialistes américains», d’autres revendiquaient «Une république socialiste basée sur l’Islam». De plus en plus, les soldats ont commencé à fraterniser avec la foule en criant: “Nous sommes avec le peuple!”.

    Même la classe capitaliste dirigée par le Front National d’Iran de Mehdi Bazargan, qui avait tout d’abord limité ses ambitions à un partage du pouvoir avec le Chah, a été forcée par le développement d’une atmosphère ‘rouge’ à adopter un programme ‘semi-socialiste’.

    La révolution iranienne avait suivi les traces de la révolution russe de 1905, mais à un plus haut degré. A l’époque, les masses avaient accordé leur confiance aux ‘démocrates’ en costume qui avaient promis qu’ils arriveraient à faire entendre raison au Tsar. En Iran, partout, on pouvait entendre des cris réclamer que le Shah soit poussé hors du pouvoir.

    Les travailleurs des services publics et des banques ont joué un rôle crucial pour exposer au grand jour la nature particulièrement pourrie du régime. Des employés de banque avaient ainsi ouvert les livres de compte pour révéler que durant les trois derniers mois de 1978 uniquement, un milliard de livres sterlings avaient été détournés du pays pour finir dans les poches de 178 membres de l’élite iranienne. D’autre part, le Chah avait sauvé une somme similaire aux USA. La réponse des masses, furieuses, a été de brûler environ 400 banques.

    Classe, parti et direction

    Quand Mohammed Reza Pahlavi, le Chah d’Iran, a honteusement quitté le pays pour la dernière fois le 16 janvier 1979, la lutte avait largement dépassé le stade de considérer son simple départ comme une victoire. Il était maintenant question de l’abolition de l’Etat absolutiste. Quelle forme devait prendre le nouvel Iran?

    La classe ouvrière avait mené la lutte contre le Chah avec détermination : manifestations de masse, grève générale de quatre mois et, finalement, insurrection (les 10 et 11 février 1979). L’ancien régime avait été abattu pour toujours. Dans cette lutte, la classe ouvrière était devenue bien consciente de son pouvoir, mais hélas pas de la façon de l’organiser pour garder le contrôle de la société en ses mains propres.

    La Révolution teste toutes les classes sociales, et la question clé pour la classe ouvrière est de savoir si elle possède une direction décisive pour être capable de passer d’une insurrection populaire à la construction d’une société socialiste.

    En Iran – malgré le grand héroïsme des travailleurs, des étudiants et de la jeunesse – il manquait une direction marxiste de même qu’un parti de masse capable de tirer les conclusions nécessaires du cours de la révolution. La tâche des marxistes était alors d’expliquer la nécessité pour la classe ouvrière, alliée aux minorités nationales et aux paysans pauvres, de prendre consciemment le pouvoir dans ses mains et de réaliser les tâches d’une révolution socialiste.

    Mais la gauche iranienne n’a pas saisi cette opportunité. Les plus grandes forces de gauche étaient à l’époque le Parti communiste (Toudeh) et les guerrillas des Fedayin du Peuple (‘marxiste’) et de l’Organisation des Moudjahiddines du peuple iranien (islamiste).

    Ces organisations avaient beaucoup de membres, jouissaient d’un grand soutien dans la population et possédaient des armes. Mais elles souffraient énormément de leur confusion programmatique. Elles n’ont pas poursuivi de politique de classe indépendante pour les travailleurs, mais se sont au contraire mises à la remorque de Khomeini malgré les tentatives du clergé intégriste d’étouffer chaque mouvement indépendant des travailleurs.

    La chute de l’autocracie avait laissé le pouvoir vide d’occupant. Mais au moment précis où les masses auraient dû prendre en main leur destinée, quand le pouvoir était à elles, le Toudeh a proposé l’instauration d’une ‘république musulmane démocratique’. En réalité, cela signifiait que le Toudeh refusait de prendre la direction de la révolution pour participer à la réalisation des objectifs poursuivis par les Mollahs.

    La montée de l’islam politique de droite

    Les relations entre le Chah et son orientation pro-occidentale et les mosquées islamiques étaient depuis longtemps très tendues. Quand le Chah avait dépossédé les mosquées de leurs terres, le clergé musulman avait furieusement réagi et s’était vertement prononcé contre ce régime athée. Le guide spirituel des chiites iraniens, l’Ayatollah Khomeini, avait d’ailleurs été poussé à l’exil en Turquie et plus tard à Paris à la suite d’une révolte contre les expropriations de terres en 1963. Des douzaines de personnes y avaient rencontré la mort du fait de la répression.

    Marx avait décrit la religion comme "le soupir de la créature opprimée". A cause de l’interdiction de toutes les organisations opposées au Chah, les adversaires du regime avaient tendance à se rassembler autour des mosquées, où étaient délivrés des sermons radicaux. De plus en plus, ces sermons étaient considérés comme une lutte contre le totalitarisme.

    Les positions de Khomeini, en exil, étaient distribuées par cassettes audio en Iran. Arrivées en nombre restreint, elles étaient ensuite reproduites et diffusées. Khomeini et les autres Mollahs parlaient de liberté et de démocracie, d’un retour à un Islam épuré, débarassé des influences occidentales et non-islamiques qui avaient, selon eux, corrompus la culture et conduit la société dans une voie sans issue.

    Dans l’Iran économiquement semi-arriéré de l’époque, avec un haut niveau d’illettrisme et environ la moitié de la population vivant dans les campagnes, les paroles des Mollahs étaient une puissante force d’attraction pour les paysans et certaines parties de la classe moyenne, même pour des travailleurs. Alors que le Front National d’Iran voulait faire des compromis avec la dynastie, Khomeini voulait la faire tomber. Quand les masses entendaient les appels pour une République Islamique, elles comprenaient une république ‘du peuple’, pas des riches, où leurs revendications auraient été prises en compte.

    Dès le triomphal retour d’exil de Khomeini le 1er février 1979, le Toudeh a immediatement accordé son soutien à la formation d’un Conseil Révolutionnaire Islamique et lui a demandé de le rejoindre dans un Front Populaire Unis.

    Revolution et contre-révolution

    Mais ce même mois de février 1979, une situation de double pouvoir s’est développée à Téhéran. Le gouvernement s’était sauvé alors que les travailleurs, qui contrôlaient les usines et les enterprises, organisaient des comités démocratiques de travailleurs et saisissaient les armes des forces armées.

    C’est toutefois Khomeini qui a bénéficié de cette vague révolutionnaire. En mélangeant des intérêts de classe contradictoires et opposés, son mouvement a réussi à obtenir le soutien des forces séculaires et non-religieuses, grâce à une rhétorique populiste radicale: une république islamique favorisant les opprimés contre les tyrans locaux et l’impérialisme américain.

    Les militants religieux ont été aptes à détourner la révolution car ils étaients la seule force dans la société qui avait un objectif politique défini ainsi qu’une organisation et une stratégie pratique pour l’atteindre.

    Le 1er avril, Khomeini a obtenu une victoire à travers tout le pays lors d’un référendum national qui demandait à faire se prononcer face à l’unique choix suivant : République islamique – Oui ou Non.

    Les derniers jours qui ont précédé le référendum, pourtant, il a néanmoins été forcé à être plus prudent. Des confrontations avaient lieu entre les Gardiens de la Révolution Islamique et les travailleurs qui voulaient garder leurs armes récemment acquises. Khomeini dénonçait ceux qui souhaitaient continuer la grève générale comme des "traîtres que nous devons frapper au visage".

    En essayant de trouver un équilibre entre les classes sociales, il a dans le même temps accordé de grandes concessions aux travailleurs. Les médicaments et les transports gratuits ont été instaurés, des factures d’eau et d’électricité ont été annulées et les produits de première nécessité ont été lourdement subsidiés pour maintenir de bas prix.

    Mais les coffres de l’Etat étaient vides et le chômage atteignait 25%. En juillet, des décrets de nationalisation ont alors été dévoilés, accompagnés de l’établissement de tribunaux spéciaux avec le pouvoir d’imposer de deux à dix ans de prison pour "tactiques perturbatrices dans les usines ou agitation ouvrière".

    Khomeini n’a cependant été capable d’instaurer la base de son pouvoir que graduellement. Puis, quand l’Irak a envahi l’Iran en 1980, début d’une guerre sanglante de huit années, les masses se sont ralliées en défense de la révolution. A ce moment déjà, les braises révolutionnaires s’étaient refroidies.

    Le Parti Républicain Islamique mis sur pied par le clergé du tout nouveau Conseil révolutionnaire était lié aux vieux petits bourgeois (les petits capitalistes) et aux marchands des bazars qui réclamaient de l’ordre et la défense de la propriété privée. Tout en défendant ces couches conservatrices, Khomeini s’attaqua à l’impérialisme occidental en nationalisant le secteur pétrolier.

    Un régime hybride

    L’Etat islamique iranien est une république capitaliste d’un type particulier – un Etat religieux capitaliste. Dès le début, deux tendances sont apparues dans le clergé.

    Un groupe, autour de Khomeini, défendait que les Imams soient au pouvoir à travers un Etat capitaliste semi-féodal avec de nombreux centres de pouvoir. A leurs yeux, l’impérialisme américain représentait le ‘Grand Satan’ et ils encourageaient l’exportation du fondamentalisme islamique à travers le monde musulman. D’autres figures dirigeantes du régime, avec une aile cléricale plus pragmatique, voulait construire un Etat capitaliste moderne et centralisé. Tout en continuant à dénoncer les USA, ils ont voulu, particulièrement dans la dernière ‘90, renforcer les liens avec les pays occidentaux.

    Les conflits entre ces deux tendances et les crises politiques périodiques qui en resultent n’ont jamais été résolus et ont été à la base des conflits entre l’Ayatollah Khamenei et le président réformiste Khatami, élu avec une grande majorité en 1997.

    Conclusions

    Les évènements d’Iran ont permis la croissance d’un islam politique militant dans le monde musulman. En surface, il s’agit d’une demonstration de la force des masses pour lutter contre l’impérialisme.

    Mais en tant que marxistes, nous devons être clairs. L’Islam n’est pas en soi plus radical ou réactionnaire que toute autre religion au monde, et le fondamentalisme islamique n’est pas un phénomène homogène.

    Les conditions qui ont permis le développement d’un Islam politique de droite ont été créées par la faillite des mouvement nationalistes arabes et par les trahisons des partis ‘communistes’ qui ont refusé de mener une politique de classe indépendante et se sont rangés derrière différentes formes de bourgeoisies nationales. Mais le développement de l’Islam politique de droite reflète également qu’en Iran et ailleurs, le capitalisme est dans une impasse dans la région. Les masses opprimées ont besoin de trouver leur propre voie de sortie.

    Les variantes plus tardives d’Islam politique n’ont qu’une partie du radicalisme que Khomeini a été force d’embrasser au cours des premiers mois de la révolution iranienne.

    Les Talibans et les méthodes terroristes d’Al-Qaïda et d’Oussama Ben Laden n’offrent pas de solution à la lutte des masses opprimées contre le capitalisme et les propriétaires terriens. Au contraire, ces méthodes divisent la classe ouvrière et l’empêchent d’avoir son identité distincte et combative.

    Aujourd’hui, 20% des Iraniens possèdent la moitié de la richesse du pays. La lutte des classes refait régulièrement son apparition. Les édits abrutissants des Imams s’opposent résolumment à la volonté des jeunes de vivre librement leur vie.

    L’avenir de l’Iran est incertain. Un nouveau parti de la classe ouvrière doit être construit sur des bases marxistes solides, un parti qui soit capable d’apprendre pourquoi la révolution a été volée aux travailleurs en 1979.

    Les revenus pétroliers du pays ont diminué de moitié depuis lors, avec de graves conséquences pour la classe ouvrière. Celle-ci reviendra sur le devant de la scène pour finir ce qui avait été initié par la dernière révolution.


    Le développement du capitalisme avant la révolution

    Avant 1979, l’impérialisme voyait l’Iran comme une ‘ligne de front’ cruciale en tant qu’Etat-tampon contre l’influence de l’Union Soviétique dans le Moyen Orient et l’Asie du Sud. De plus, ces fabuleuses réserves de pétrole étaient vitales pour les intérêts occidentaux.

    En 1953, un mouvement nationaliste radical dirigé par le Premier ministre Mossadegh et le Front National d’Iran avait cherché à nationaliser l’industrie pétrolière du pays, déclenchant des manifestations et des éléments d’insurection pupulaire. Le Chah avait été temporairement forcé de s’exiler suite à la pression du mouvement de masse.

    La réaction de l’impérialisme a été décisive. La Grande-Bretagne et les Etats-Unis ont demandé l’arrestation de Mossadegh et ont mis en branle l’oppération Ajax en déployant des forces secrètes en Iran pour forcer l’armée iranienne à agir dans les intérêts des puissances occidentales.

    Le Chah a été réinstallé et a dirigé l’Iran d’une main de fer pendant vingt-cinq ans. Son retour a été synonyme de répression brutale de l’opposition politique organisée et des synidicats, déclarés illégaux. De soncôté, la CIA a accordé son ‘aide’ pour réorganiser les forces de sécurité.

    Après 1953, l’Iran est entré dans une ère frénétique d’industrialisation, largement sur base du programme économique du Front National capitaliste, ce qui a érodé sa popularité. L’idée était de transformer la noblesse en classe capitaliste moderne, une classe dirigeante sur le modèle occidental.

    Des réformes agraires ont été introduites, qui ont enrichi les propriétaires terriens féodaux grâce à des compensations financières énormes. Ils étaient encouragés à investir cet argent dans les nouvelles industries.


    Une rude exploitation

    Les paysans, eux, ont par contre beaucoup souffert de cette situation. Environ 1,2 million d’entre eux ont eu leurs terres volées, avec en conséquences la famine et un exode important vers les villes où ils onstituaient une main d’œuvre extrêmement bon marché pour les nouveaux capitalistes.

    Avant la révolution, 66% des travailleurs dans le secteur des tapis de la ville de Mashad étaient âgés de six à dix ans tandis qu’à Hamadam, une journée de travail était de 18 heures. En 1977, la plupart des travailleurs gagnait 40 livres sterling par an. Même s’il existait formellement un salaire minimum, 73% des travailleurs gagnaient encore moins que cela…

    Les usines iraniennes ressembaient à l’Enfer de Dante, la ressemblance avec la Russie pré-révolutionnaire était frappante. Là aussi, un processus d’industrialisation casse-cou avait été mené par une classe capitaliste très faible essayant de s’extirper elle-même d’un passé féodal en créant, selon les mots de Marx, son ‘fossoyeur’ sous la forme d’une classe ouvrière militante.

    Au fur et à mesure de l’arrivée des paysans dans les villes, la population urbaine a doublé pour atteindre 50%. Téhéran était passé de trois millions d’habitants à cinq millions entre 1968 et 1977, avec 40 bidonvilles autour de ses banlieues.

    En 1947, il n’y avait que 175 grandes entreprises employant 100.000 travailleurs. 25 ans plus tard, 2,5 millions de travailleurs étaient engagés dans les usines, un million dans l’industrie de la construction et presque le même nombre dans le transport et les autres industries.

    L’Iran était en pleine transition, à moitié industrialisée, à moitié coloniale. Une puissante classe ouvrière avait émergé en une seule génération. En Russie, la classe ouvrière avait grimpé jusqu’à 4 millions sur une population totale de 150 millions. Armée du marxisme, cette classe ouvrière avait pu engager la paysannerie derrière elle pour rompre la chaîne du capitalisme à son point le plus faible, en 1917.

    En comparaison, le poid social de la classe ouvrière iranienne était bien plus important – environ quatre millions de travailleurs sur une population de 35 millions.


    Ne jamais envahir une révolution

    L’impérialisme américain a regardé, impuissant, les derniers jours du Chah en Iran. Des voix s’étaient élevées au Pentagone pour envoyer des porte-avions et des marines dans le Golfe, mais des personnes plus avisées au sein de la classe dirigeante américaine avaient estimé :‘on n’envahit pas une révolution populaire’.

    Les Etats-Unis étaient tout juste en train de commecer à lêcher leurs plaies suite à la cuisante défaite de la guerre du Vietnam. Là-bas, la lutte sociale des paysans et des travailleurs pour se débarrasser des chaînes de l’oppression avait mis la superpuissance sur les genoux.

    Une invasion de l’Iran dirigée par les USA aurait eu d’incalculables répercussions à une échelle mondiale, particulièrement dans le monde colonial où le Chah d’Iran était aux yeux des masses considéré comme le plus pourri de tous.

    La Révolution iranienne a fait trembler les Etats-Unis. Le président américain Jimmy Carter avait été humilié quand les Ayatollahs avaient organisé des mouvements de foule contre l’embassade américaine à Téhéran, où 66 personnes avaient été prises en otage.

    En 1983, Ronald Reagan avait été forcé de retirer les troupes américaines hors du Liban en raison des pertes causées par le Hezbollah, qui avait le soutien de l’Iran.


    Economie: Un abîme croissant

    L’Iran était le second plus gros exportateur de pétrole en 1978, et le quatrième plus gros producteur. Quand les prix du pétrole ont quadruplé entre 1972 et 1975 suite à la guerre israélo-arabe, le Produit National Brut (PNB) iranien avait augmenté de 34% en une seule année. Des milliards sont alors tombés dans les poches du Chah et de sa clique.

    Mais avec 45 familles contrôlant 85% des grandes et moyennes entreprises et les 10% les plus riches de la population ayant 40% de l’argent du pays, le fossé entre les classes était chaque jour plus important.

    Environ un quart des Iraniens étaient dans une situation de pauvreté absolue. Comme pour illustrer son arrogance en tant que monarque absolu, le Chah avait declaré en 1976, mois de trois avant avant de devoir fuir du pays: "Nous n’avons pas encore demandé au peuple de faire des sacrifices. Au contraire, nous les avons comme couvert d’ouate. Les choses vont maintenant changer. Chacun devra travailler plus et être prêt à faire des sacrifices au service du progrès de la Nation."

  • Disparition d’espèces : « Always Coca-cola »

    Tout le monde connaît cette publicité de la célèbre boisson gazeuse américaine où un ours polaire se délecte d’une bouteille de coca tout en clignant de l’œil à l’écran. La multinationale ne pourra bientôt plus utiliser cette publicité : si rien ne change, il n’y aura plus d’ours polaires en 2030.

    En fait, six espèces d’ours sur huit sont menacées d’extinction. En Asie du Sud, la chasse à l’ours est illégale, mais beaucoup de paysans doivent se résoudre, poussés par la pauvreté, à devenir braconnier, un « métier » qui rapporte bien plus que de travailler pour des salaires de misère dans les usines des multinationales ou de leurs sous-traitants. L’ours noir d’Asie, l’ours Lippu, l’ours malais et l’ours des cocotiers payent le prix de la répartition inégale des richesses tandis qu’en Amérique Latine, l’ours Andin est victime du même processus.

    En fait, seuls l’ours brun et l’ours noir résistent à cette menace, mais ils habitent dans des pays moins touchés par la misère et la corruption, où les contrôles sont plus aisés et où personne ne va risquer sa vie pour les quelques dollars que peuvent rapporter aux chasseurs la bile, les pattes ou la fourrure des ours.

    Si les multinationales continuent à imposer leurs diktats sur le monde en méprisant fatalement l’environnement tout comme leurs travailleurs au bénéfice de profits gigantesques, la situation ne peut qu’empirer. Ce n’est pas seulement ce qui entraîne directement le réchauffement climatique ou la disparition d’espèce à cause de l’altération de leurs milieux de vie qu’il faut critiquer. L’exploitation, la misère, la répartition inégale des richesses ou encore l’absence d’accès à de véritables soins (ce qui contribue à faire perdurer des croyances selon lesquelles la bile des ours (ou les os de tigres, etc.) a des vertus « bénéfiques ») sont aussi responsables de la crise environnementale. C’est le système dans son entièreté et au niveau mondial qu’il faut combattre pour accéder à une société où personne n’aura à détruire son environnement pour survivre un jour de plus.

    Au slogan publicitaire « Toujours Coca Cola », opposons celui de Che Guevara « Pour la lutte, toujours ! »

0
    0
    Your Cart
    Your cart is emptyReturn to Shop