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Tag: L’Arizona, un projet brutal contre notre classe sociale. Se révolter & s’organiser pour gagner!
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Luttons pour une société qui repose sur les soins aux autres, pas sur les profits
Un bricolage à la marge ? Insuffisant !
- Des investissements publics à hauteur des besoins dans les soins et l’aide sociale
- Prenons soin du personnel soignant : réduction collective du temps de travail à 32
heures par semaine, sans perte de salaire et avec des embauches compensatoires - Repoussons les attaques de l’Arizona contre les pensions, les salaires, les services
publics et les personnes les plus vulnérables - Pour un plan d’action en escalade avec des manifestations et des grèves pour
imposer un changement radical - Le système capitaliste est pourri jusqu’à la moelle : il nous faut une société qui ne
laisse personne de côté
Le manque de moyens est alarmant et permanent, la pression sur notre secteur des soins et de l’aide sociale ne fait qu’empirer. Les nouveaux et futurs gouvernements, quel que soit le niveau de pouvoir, n’ont aucune intention d’allouer les fonds nécessaires aux divers services ainsi que pour de bonnes conditions de travail. En Flandre, le milliard d’euros promis n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan face au sous-investissement structurel.
Tract distribué ce 7 novembre à l’occasion de la manifestation des secteurs publics et non marchands du socio-culturel, des soins de santé et du bien-être.
Durant la pandémie, les autorités ont prétendu rejoindre les applaudissements de la population pour l’héroïsme du personnel des soins. Depuis lors, tout s’est aggravé. Le manque de collègues conduit à une gestion plus autoritaire dans tous les secteurs.
Stop à la répression et à l’oppression ! Investissement dans l’aide sociale et la santé !
Le sous-financement force le secteur social à jouer un rôle de police pour gérer la pénurie. De quel côté sommes-nous ?
Cette manifestation le dit haut et fort : le bricolage à la marge est insuffisant. Il faut une résistance coordonnée face à la politique de tous les gouvernements, avec la mobilisation de néerlandophones et de francophones, du personnel des secteurs public et privé, du secteur des soins et de celui de l’aide sociale. C’est par la lutte que nous pouvons donner la meilleure expression de notre solidarité. C’est par la lutte que nous pouvons organiser la colère des collègues pour imposer le changement nécessaire.
D’un secteur à l’autre : construire l’unité d’action !
Une seule manifestation ne suffira pas pour nous imposer face aux décideurs politiques. Ils ne nous écouterons que lorsqu’ils ne pourront plus détourner le regard. Des concessions de leur part n’arriveront que s’ils craignent le mouvement. La construction d’un tel rapport de force est possible en intensifiant nos actions et en les élargissant. Nous avons besoin d’un plan d’action en escalade qui nous conduise à des actions de plus en plus fortes en impliquant davantage de collègues, en mobilisant les bénéficiaires de nos services et en mobilisant la classe travailleuse dans toute sa diversité contre les politiques antisociales. C’est par une lutte résolue que nous pouvons donner le ton du débat public et construire un rapport de force.
L’importance d’agir de la sorte dépasse largement nos secteurs. Les perspectives pour le futur gouvernement fédéral sont terribles. Ce sera Halloween toute l’année pour les travailleur.euse.s afin de permettre aux capitalistes de fêter Noël toute l’année. Pensions, salaires, services publics, chômeurs, malades… rien ne sera laissé intact. Pour De Wever et Bouchez, il n’y a pas d’autre choix. Leur “choix” est clair : cajoler les grandes entreprises et les super-riches. Stop au hold-up social, stoppons l’Arizona !
Les populistes de droite capitalisent sur les problèmes sociaux et l’insécurité après les avoir eux-mêmes organisés. Les politiques qui excluent favorisent les problèmes de toxicomanie, de pauvreté, de violence… Où vont se retrouver les personnes exclues du chômage ? Certaines au CPAS, d’autres dans la rue. La droite veut en plus transformer le secteur social en un appareil policier reposant sur le contrôle. Notre sécurité sociale est une protection pour l’ensemble de la classe travailleuse, mais c’est aussi un moyen de maintenir un lien avec la société. Protégeons notre sécurité sociale ! Celui qui touche à l’un.e d’entre nous nous touche tous.tes !
Répondre à la droite : changer fondamentalement la société !
Nos revendications représentent la diversité de nos secteurs et lieux de travail. Mais elles se rejoignent autour d’une même question : quel type de société voulons-nous ? Une société froide où les secteurs du soin sont une usine dirigée par des managers autoritaires ? Ou une société où les innombrables talents et capacités de chacun.e peuvent être pleinement développés, une société où les services à la population sont plus nombreux et plus accessibles ?
Le capitalisme nous entraîne vers l’abîme au nom de la recherche de profits pour une infime minorité. Il sème la barbarie dans tous les domaines, de « notre » crise des soins à la promotion de la haine de l’autre (racisme, sexisme, LGBTQIA+phobie…), en passant par les catastrophes climatiques, les guerres et les génocides. Nous luttons au contraire pour une société anticapitaliste et socialiste où les moyens de production seront sous le contrôle démocratique et la propriété de la classe travailleuse afin que nous puissions utiliser les ressources et les richesses disponibles dans le cadre d’une planification rationnelle de l’économie. En bref : un bouleversement radical où la classe travailleuse, dans toute sa diversité, aura le contrôle de la société.
Contre les violences sexistes et sexuelles : manifestez avec nous le 24 novembre
« La honte doit changer de camp ». C’est ce qu’a déclaré Gisèle Pélicot, cette femme de 72 ans, lors du procès de 50 de ses violeurs. Cette affaire démontre à quel point la société est imprégnée de la culture du viol et de la violence de genre. En Belgique, plus de 11.000 plaintes pour viol ont été déposées en 2023, soit une moyenne de 30 par jour. Ce n’est qu’une fraction de cette violence ; 82 % des agressions sexuelles ne sont pas signalées. Pourquoi ? Par honte, par peur de ne pas être cru.e, par manque de conseils et de soins…
Nous pouvons faire changer la honte de camp par la lutte. Manifestez avec nous le 24 novembre à Bruxelles contre les violences sexistes et sexuelles et pour un investissement public massif dans les soins, l’enseignement et la prévention.
Stoppons le génocide !
Le génocide à Gaza touche l’ensemble de la population, y compris nos collègues soignants. Fin octobre, l’hôpital Al-Aqsa, au centre de Gaza, a été à nouveau bombardé alors que les réfugiés tentaient de survivre sous des tentes dans la cour. Le dernier hôpital encore en activité dans le nord de la bande de Gaza a été attaqué pour la 14e fois, emportant 44 médecins et infirmier.ère.s. La solidarité avec le personnel soignant de Gaza, de Cisjordanie et du Liban est nécessaire ! En mars, le personnel de l’hôpital Brugmann de Bruxelles a organisé une action pour exiger un cessez-le-feu immédiat et manifester sa solidarité avec ses collègues de Gaza. Une idée pour votre lieu de travail ?














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Repoussons la menace avec un plan d’action et la construction d’un mouvement de masse!
Les négociations pour un gouvernement fédéral « Arizona » sont dans l’impasse. La « super-note » de De Wever a été balayée de la table. Non pas en raison des terribles attaques antisociales qu’elle comprenait, mais parce qu’une petite contribution symbolique de la part des plus riches était de trop pour le MR. L’entente était par contre unanime concernant la “nécessité” de mesures antisociales drastiques. Les négociations reprendront sérieusement une fois les élections communales passées.
Le député européen Johan Van Overtveldt (NVA) a explicitement déclaré au début de l’année politique à l’organisation patronale flamande Voka que la super note n’avait en rien disparu. “Si l’on veut réformer et assainir notre pays, il y a des choses que l’on ne peut pas éviter. Sinon, un accord de coalition n’a aucun sens”. Bart De Wever a lui-même été très clair : tout revient sur table le 14 octobre.
Le patronat partage le constat. Et en réclame davantage. Pierre Wunsch, gouverneur libéral de la Banque Nationale, a déclaré que la super-note n’était pas suffisante. “Il y a une volonté claire de mettre en œuvre certaines réformes”, s’est-il réjoui, avant de souligner qu’il fallait viser encore plus de mesures d’austérité et de nouveaux impôts. Aux frais de qui? Certainement pas de ses amis actionnaires.
Les propositions contenues dans la super note de De Wever sont révoltantes. La FGTB évoque “la plus grande régression sociale depuis 80 ans”, la CSC explique quant à elle que la super-note est “surtout super pour les super riches”. Tout cela est vrai. Attaques contre les malades, les chômeur.euse.s, les pensions, les salaires, la représentation des travailleurs, les services publics, le secteur des soins, la politique scientifique… c’est toute la classe travailleuse qui est frappée de plein fouet. L’énumération de la totalité de ce catalogue des horreurs nécessiterait d’y consacrer l’ensemble de ce journal.
Cette austérité draconienne rappelle immanquablement le néolibéralisme de Margaret Thatcher des années 1980. À cela s’ajoute une propagande qui fait porter la responsabilité de la pénurie de moyens aux réfugié.e.s, chômeur.euse.s et malades. C’est bien pratique pour détourner l’attention sur la concentration des richesses aux mains d’une petite minorité de capitalistes. Avec Bouchez et Francken, les politiques thatchériennes sont doublées d’une bonne dose de haine de l’autre que ne renierait pas Donald Trump.
Organisons la riposte dès maintenant!
Plus vite nous organiserons notre riposte contre ces projets, plus nous serons fort.e.s. Ces dernières années, le mouvement ouvrier a fait l’expérience de mouvements de lutte remarquables.
Le mouvement de 2014 contre le gouvernement de Charles Michel a montré la puissance d’un plan d’action en escalade. Ce gouvernement de droite dirigé par la N-VA et le MR était lui aussi uni dans sa détermination à s’en prendre aux salaires et aux pensions, entre autres. Une concentration syndicale militante fut le prélude à une manifestation nationale de masse, à une tournée de grèves provinciales et finalement à une grande grève générale nationale. Les dates étaient connues à l’avance, chaque journée d’action était un tremplin vers la prochaine. Le mouvement a gagné en enthousiasme et en puissance, attirant à lui le soutien des jeunes, des artistes, mais aussi d’une foule d’indépendant.e.s.
La manifestation de masse n’était pas un point final à la lutte, mais seulement le coup d’envoi d’un automne chaud, avec 150.000 participant.e.s. La grève générale nationale du 15 décembre 2014 fut la plus importante depuis des décennies. Les grèves étaient fortes, d’autant plus lorsqu’elles avaient été préparées par des assemblées du personnel. Cette implication de la base s’est également reflétée dans le nombre record de candidat.e.s aux élections sociales qui ont suivi, en 2016. Le mouvement a eu un impact majeur sur l’opinion publique: une large majorité de la population se prononçait dans tout le pays en faveur d’un impôt sur la fortune. Tout au long du mouvement, le PTB a renforcé son implantation au sein de la classe travailleuse et a posé les jalons d’une plus grande représentation dans les parlements et conseils communaux du pays.
Malheureusement, il n’y a pas eu de deuxième plan d’actions pour poursuivre la dynamique en la portant à un niveau plus élevé. Le gouvernement a vacillé, mais il a pu profiter du répit pour se remettre sur pied. Il ne pouvait toutefois pas faire ce qu’il voulait! Des actions de masse successives ont permis d’enrayer l’imposition d’un système de “pension à points”. L’élan vers ces actions avait été assuré par plusieurs initiatives, dont celle d’un “journal des pensions”, imprimé à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires et largement distribué dans les entreprises et parmi le grand public.
Face à la pire régression sociale depuis 80 ans, revendiquer “plus d’équilibre” ne suffira pas. Journaux d’information, assemblées militantes régionales, assemblées du personnel… permettent de lancer un plan d’action avec des grèves soigneusement préparées pour repousser les attaques. Il faut des mots d’ordre à la hauteur des enjeux, reposant sur l’unité dans la lutte et la solidarité active.
Une faiblesse qui a également joué un rôle non négligeable dans l’absence d’un deuxième plan d’action après celui de fin 2014 était la question de l’alternative. Si nous limitons cette question à ce qui est possible aujourd’hui avec les partis dominants et dans le respect des règles budgétaires construites pour faire tourner la machine à profit, nous n’arriverons à rien. Avec un rapport de forces favorable, ce que la propagande capitaliste déclare impossible devient soudain possible. Ce n’est pas autrement que le mouvement ouvrier est parvenu à arracher le suffrage universel et la Sécurité sociale.
Nos revendications et notre alternative sont plus fortes si elles sont portées par le plus grand nombre possible de collègues. Lors des réunions du personnel, il ne faut pas seulement donner des informations et organiser les actions, c’est l’endroit idéal pour soulever ce qui est nécessaire comme mesure dans son entreprise, son secteur, son service public. C’est ainsi que l’on peut impliquer les collègues dans l’élaboration société qui répond aux besoins du terrain et non aux diktats du marché.
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Alors que les licenciements collectifs se multiplient, la chasse aux chômeur.euse.s s’intensifie
La coalition Arizona, probable futur gouvernement fédéral, compte bien intensifier la chasse aux chômeurs. Dans leurs beaux costumes taillés sur mesure, les politicien.ne.s de la classe dominante ont chargé leur fusil de chasse en claironnant lors de la campagne électorale qu’il fallait limiter le paiement des allocations de chômage à 2 ans. Objectif ? Botter le cul aux chômeur.euse.s pour les contraindre à accepter n’importe quel travail et à n’importe quel prix. Après les exclusions du chômage du gouvernement Di Rupo, la saison de la chasse est à nouveau ouverte. Cette fois-ci, la couleur du costume taillé sur mesure des chasseurs tourne plutôt au brun caca d’oie.
Par Maxime (Liège)
La supernote de Bart de Wever (N-VA) a donné le ton lorsque ses propositions ont fuité dans la presse: il est temps une fois de plus de s’attaquer aux personnes les plus précarisées. La proposition de cette note était de limiter le chômage dans le temps en augmentant les montants dans un premier temps, puis en mettant en place une dégressivité allant jusqu’à l’exclusion des allocations. Couic !
Si vous êtes de Wallonie, cette proposition doit vous rappeler quelque chose. Le Trump borain, Georges-Louis Bouchez, nous a assez rabattu les oreilles avec. La justification ? Augmenter la différence entre les revenus du travail et les allocations du chômage. Alors qu’il suffirait d’augmenter les salaires pour atteindre cet objectif ! Mais leur objectif est de rendre encore plus invivable la vie des plus précarisé.e.s : les chômeur.euse.s et les malades de longue durée.
Alors, ça fonctionne?
Comme nous le rappelions dans notre édition de juin 2024, cette mesure s’avère inefficace et constitue uniquement de la poudre aux yeux électorale.
À partir de 2006 a été mise en place le contrôle des demandeur.euse.s d’emplois. À la suite de quoi une étude a suivi pendant 15 ans des demandeur.euse.s d’emploi de moins de 50 ans. Le résultat est sans appel : le durcissement des conditions d’accès et du contrôle n’a eu aucun résultat positif. “La seule chose, c’est que les gens exclus du chômage se sont retrouvés dans une autre branche de la Sécu, essentiellement la branche invalidité. Ils n’étaient plus chômeurs, mais malades de longue durée”, expliquait ainsi Maxime Fontaine, spécialiste des finances publiques et de la sécurité sociale (ULB), dans les pages du magazine Moustique.
Ces propositions ne sont, une fois de plus, qu’un effet d’annonce sur une cible facile. Les salaires, en raison des tripotages de l’index, des sauts d’index et de la loi de 1996 sur la norme salariale, n’ont pas suivi l’augmentation réelle du coût de la vie. La recette est connue : les gens sont frustrés, car leur niveau de vie diminue de plus en plus à cause de l’inflation et de la flexibilisation des emplois, et ils cherchent un coupable.
La coalition Arizona ressort donc de vieilles ficelles pour précariser encore plus les plus précarisé.e.s : réclamer une hausse des salaires ne leur viendrait même pas à l’esprit !
Du Forem au CPAS
Une autre conséquence de cette mesure sera d’envoyer les demandeur.euse.s d’emploi de l’institution chargée du chômage (Forem, Actiris et VDAB) vers les CPAS des communes. La mesure augmenterait ainsi le nombre de bénéficiaires du RIS (Revenu d’Intégration Sociale) et ajouterait un poids financier important sur des communes déjà en difficulté. Heureusement, Bart a pensé à cela et propose de compenser cela par une augmentation du financement des CPAS de 200 millions d’euros. Sauf que comme le précise la FGTB, qui a analysé les effets probables de cette mesure, ce serait bien de 700 millions d’euros dont auraient besoin les CPAS pour répondre au nouvel afflux de bénéficiaires : verser les RIS, engager de nouveaux assistant.e.s sociaux.ales, absorber la demande….
La fin des tensions sur le marché du travail ?
Un autre constat vient également jouer en défaveur des demandeur.euse.s d’emploi : la demande est plus grande que l’offre sur notre marché de l’emploi. Au second trimestre 2024, ils étaient 284.000 à chercher un emploi en Belgique. Contre 278.520 offres d’emploi publiées par les agences d’aide à l’emploi (Forem, Actiris et VDAB).
En outre les offres d’emploi ne correspondent pas toujours aux profils des demandeur.euse.s d’emploi et il est souvent nécessaire de suivre des formations pour se réorienter. Comment réaliser ce changement de manière sereine avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête ?
Résumons. Il s’agit d’une mesure inefficace pour obliger les gens à se remettre au travail sans tenir compte d’un marché de l’emploi où la demande dépasse l’offre et en faisant peser l’effort sur les communes belges sans leur fournir les moyens d’y faire face. Qu’est-ce qui pourrait mal se passer ?
Le résultat sera de faire pression sur les salaires: le patronat, avec l’état actuel du marché du travail, dispose déjà de pas mal de moyens de pression pour engager un.e travailleur.euse à moindres frais. Cette limitation dans le temps accentuera ces moyens de pression et le chantage au travail incitera les gens à accepter des salaires moindres. D’une mesure voulant augmenter la différence entre salaire et chômage, ils n’accoucheront que d’une mesure diminuant les salaires. Heureusement que nous sommes dirigé.e.s par “l’élite” politique, sans quoi où irions-nous ?
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Attention aux voleurs! L’Arizona veut nous faire les poches !
La propagande de droite dit que travailler devrait rapporter plus et qu’il devrait y avoir une différence d’au moins 500 $ par mois entre les allocations sociales et le travail. C’est déjà le cas.(1) L’objectif de cette propagande est de s’attaquer aux allocations sociales: avec la limitation des allocations de chômage à deux ans, la baisse du revenu d’intégration, la diminution des indemnités de maladie, l’accès plus difficile aux pensions minimales… et parallèlement, une préparation d’une offensive contre les salaires!
Hold-up sur les salaires
La super note ne propose pas de saut d’index, mais un bricolage du mécanisme qui en affaiblirait l’application. Par exemple, au nom des “objectifs climatiques”, elle propose de réduire le poids du prix des énergies fossiles comme le gaz dans le panier de référence de l’index. En 1994, l’index-santé a été mis en place comme mesure d’économie. Au nom de notre santé, le prix de certains produits nocifs pour la santé avait été retiré du calcul (y compris le tabac sur lequel des taxes de plus en plus élevées ont été introduites par la suite). Aujourd’hui, c’est l’argument du climat qui est utilisé dans le même objectif. Bien entendu, le document ne mentionne pas de mesures climatiques sérieuses en contrepartie. En outre, il négocie la possibilité d’éliminer partiellement l’indexation en cas d’inflation supérieure à 4%, en introduisant une augmentation plus aléatoire des salaires. Ce serait donc au moment où l’indexation serait la plus nécessaire qu’elle serait moins efficace.
L’accroissement de la flexibilité des travailleur.euse.s exercera une pression supplémentaire sur les salaires. Il est question d’augmenter les emplois flexibles, de permettre davantage de travail étudiant, de limiter la définition du “travail de nuit”, d’ouvrir les possibilités de travailler le dimanche et les jours fériés, d’abolir le nombre minimum d’heures de travail par jour, de développer les possibilités d’effectuer des heures supplémentaires sans que celles-ci soient rémunérées comme tel…
Pour faire passer tout cela, De Wever veut accroître les divisions sur le lieu de travail. Il est plus facile de briser les doigts un par un que de se retrouver face à un poing. Cette règle de base s’applique aussi à la lutte de classes. La note parle de négociation individuelle du salaire, de suppression progressive de la concertation sociale et d’introduction d’un actionnariat d’entreprise organisé entre quelques travailleur.euse.s. Dans ce dernier cas, un organe serait délibérément mis en place à côté de la représentation élue du personnel, et contre celle-ci.
La réduction du nombre de commissions paritaires, la diminution de la protection des délégués et de la personnalité juridique des syndicats complètent le tableau de cette offensive contre le pouvoir d’organisation de la classe travailleuse.
Pouvoir d’achat et pensions
Une augmentation de la TVA sur les produits de base de 6 à 9% est proposée pour remplacer les taux de 6 et 12%. Le taux de 12% s’applique aujourd’hui notamment aux repas préparés dans le secteur de l’hôtellerie et dans la restauration. Mais tout le monde ne s’y rend pas tous les jours. En revanche, le taux de 6% s’applique à la quasi-totalité des produits de base. Le taux de TVA ajusté devrait rapporter jusqu’à 2 milliards d’euros. Cet argent sort essentiellement des poches des moins nantis.
Il n’y a qu’à se servir sur les allocations sociales! Les chômeur.euse.s se retrouveraient avec un revenu d’intégration du CPAS non indexé au bout de deux ans, les malades sont traqués, l’enveloppe bien-être destinée à augmenter les allocations sociales serait largement supprimée et l’accès à une pension minimale restreint. Les personnes qui prendraient leur retraite avant l’âge légal de 67 ans recevraient une pension réduite (un « malus » qui augmenterait dans les années à venir). Les pensions plus élevées de la fonction publique seraient réduites. Dans tous ces cas, les femmes seraient particulièrement touchées.
Rien que sur les pensions, De Wever veut économiser 2 milliards d’euros! Au profit de qui ?
Au cours des six dernières années, la richesse créée par les travailleurs des plus grandes entreprises opérant en Belgique a augmenté de 45%. Au cours de la même période, les “dépenses” par salarié.e dans ces entreprises n’ont augmenté que de 13%. Une part croissante de la valeur que nous produisons est aspirée dans les bénéfices et distribuée aux actionnaires sous forme de dividendes. (1) Les gouvernements successifs ont multiplié les cadeaux aux grandes entreprises sous forme de réductions d’impôts en tous genres qui ont fait chuter d’un tiers la contribution patronale réelle à la sécurité sociale, passée de 34% en 1996 à 22 %. (2) On ne prête qu’aux riches, comme le dit le dicton.
Au cours des dix dernières années, la part des salaires dans le produit national brut est passée de plus de 51% à 48,5%. Cela signifie que sur l’ensemble de la valeur produite, une part plus faible est consacrée à nos salaires. Cela représente 16 milliards d’euros par an. De tels transferts de la classe travailleuse vers les capitalistes, voilà le projet des négociateurs de l’Arizona. A nous de les empêcher de nuire.
- Pour chaque tranche de 100 € de profits réalisés, les plus grandes entreprises actives en Belgique reversent 73 € à leurs actionnaires, oxfambelgique.be, 1er mai 2024.
- Chiffres du think tank Minerva sur X (Twitter), 11 septembre 2024
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L’Arizona, un projet brutal contre notre classe sociale. Se révolter & s’organiser pour gagner!
C’est une fuite dans la presse qui a permis à beaucoup d’entre-nous de découvrir le scénario préparé à huis clos contre tous les travailleur.euse.s, les jeunes, les chômeur.euse.s, les malades et les pensionné.e.s de notre pays. La coalition des droites, adoubée sans sourciller par les “socialistes” du Vooruit et les “humanistes” du CD&V – Engagés, a décidé de déclarer la guerre au monde du travail, à toutes celles et ceux qui triment au quotidien pour tenter d’avoir une vie décente. Surprise, les riches seront, eux, encore une fois préservés de toute contribution au bon fonctionnement de la société.
Par Karim, délégué syndical CGSP
Il est impossible avec les 600 mots que j’ai pour cet article de lister l’ensemble des mesures que la note De Wever prévoit. J’invite tout le monde à lire les analyses des organisations syndicales, le dossier central de ce journal ou la note elle-même parce que tout l’enjeu des semaines à venir sera de discuter et de conscientiser sur l’ampleur inédite des attaques qui se préparent. Prenons le temps de décortiquer et d’expliquer à tous nos collègues ce qui se trame. C’est le premier pas pour les impliquer dans la lutte.
Le futur gouvernement espérait certainement nous diviser en s’en prenant par étapes, tout au long de la législature, à chacune de ses cibles. L’avantage que nous avons avec cette fuite est que leur projet de frapper tout le monde est maintenant évident. Au menu des attaques: réduction des budgets des services publics (déjà en piteux état), nouvelles attaques sur les pensions (l’imposition du recul de l’âge de départ à 67 ans n’est donc pas suffisante), les enseignant.e.s, les chômeur.euse.s (allez expliquer aux travailleur.euse.s licencié.e.s de chez Audi que dans 2 ans, ils se retrouveront au CPAS), les soins de santé (ils les ont vite oubliées les promesses de la crise covid), la dérégulation brutale du travail de nuit, la suppression des sursalaires pour le personnel de nuit… bref, tout le monde va y passer.
On peut affirmer aujourd’hui que la société capitaliste tout entière présente aux travailleur.euse.s un front unique. Face à cette agression d’une ampleur historique, nous devons réfléchir activement à la construction d’un front unique de notre classe. Les enjeux pour préserver nos conditions de vie doivent nous pousser à nous retrouver sur le chemin de la lutte.
Les nombreuses fermetures d’entreprises s’ajoutent à ce tableau sombre et demandent que l’on discute urgemment dans toutes les organisations du mouvement social d’une stratégie pour lutter massivement contre ce futur gouvernement et pour préserver nos conquis sociaux. Nous sommes assez sceptiques de la stratégie actuelle de la lutte syndicale chez Audi qui nous fait craindre un enterrement du combat avant même qu’il ne commence véritablement.
Pourtant, ce lundi 16 septembre, nous étions des milliers – les sous-traitants d’Audi en tête – à exprimer notre colère et notre volonté de lutter. Les discours des dirigeants syndicaux nous ont semblé défaitistes pour ne pas dire à côté de la plaque. Aucune perspective, aucune revendication qui nous amènerait à nous unifier dans une lutte de long terme face à la machine à broyer que sera cette future coalition Arizona.
Camarades, nous sommes pourtant face à une classe dirigeante qui verra ses intérêts défendus durement par un profil qui mélange un peu du pire de Thatcher et de Trump. Camarades, nous devons nous activer, discuter, mettre pression sur nos dirigeants syndicaux, les déborder si nécessaire. Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre, mettons-nous en branle et prenons confiance collectivement dans notre capacité à les pousser dans les cordes.
Un personnage dont je ne retrouve plus le nom écrivait il y a longtemps que “La timidité chez l’esclave induit l’audace chez le tyran.” Ne soyons pas timides, luttons !
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Gouvernement flamand : une impitoyable offensive de droite saupoudrée de vagues promesses sociales
Lors du congrès de participation de Vooruit, samedi soir, Conner Rousseau a dû s’en prendre violemment à la N-VA pour présenter l’accord de coalition flamand comme ayant évité le pire. Il a déclaré avoir bloqué de nombreuses “vilaines idées” de la N-VA tout en renforçant les fonds alloués à l’aide sociale et aux transports publics. Mais un examen plus approfondi de l’accord de gouvernement révèle que si quelques vagues promesses sociales sont bel et bien écrites, c’est le venin de la droite qui a servi d’encre pour un texte qui repose sur la haine de l’autre et la division.
Des sanctions pour les personnes démunies, de l’oxygène pour les profits du privé
La teneur en sanctions de l’accord de coalition flamand est frappante. Des règles sont imposées pour tout et n’importe quoi. Du moins concernant les personnes qui ne sont pas considérées comme tel à part entière : les personnes au chômage, réfugiées, allocataires sociaux, dont la langue maternelle n’est pas le néerlandais… L’accès aux droits sociaux devient plus conditionnel, plus individuel et surtout lié à des exigences linguistiques. Le nationalisme linguistique comme mécanisme d’exclusion, en d’autres termes !
L’accord de coalition prévoit une “médiation et un suivi accrus” des personnes au chômage, avec des contrôles et des sanctions plus rapides. Les formations seraient lancées plus rapidement. Le rôle du VDAB (service flamand de l’emploi et de la formation) se limiterait à “orienter” le parcours et ne se chargerait plus de formation qu’en l’absence d’offre de formation privée ou semi-publique. Le secteur privé de la formation a de beaux jours devant lui ! Le suivi des personnes au chômage pourrait également se faire davantage au niveau local, avec l’extension des travaux d’intérêt général obligatoires sous le nouveau nom “d’emplois sociaux”. Il s’agit d’un emploi obligatoire après un an de chômage dans des tâches concernant les autorités locales, les ASBL et les écoles, à 4,5 euros de l’heure en plus de l’allocation de chômage. Pourquoi les autorités locales devraient-elles encore recruter du personnel à de bonnes conditions de travail et à de bons salaires alors qu’elles pourront compter sur du personnel obligatoire bon marché ? Cela met sérieusement à mal l’idée que cette expérience professionnelle soit un tremplin vers un emploi régulier.
Compte tenu de la proposition discutée au niveau fédéral de limiter les allocations de chômage dans le temps, le nouveau gouvernement flamand souhaite consacrer plus d’efforts pour s’en prendre aux bénéficiaires du revenu d’intégration. Conformément à la proposition fédérale d’une chasse aux malades de longue durée, le VDAB est tenu de réaliser 12.000 parcours de retour à l’emploi par an, ce chiffre devant être porté à 20.000 d’ici à 2029. L’idée n’est pas pour autant qu’il y aurait moins de malades de longue durée. Ce serait d’ailleurs étrange avec une politique dominante qui n’apporte aucune réponse aux raisons fondamentales pour lesquelles les gens tombent malades, la charge de travail intenable n’étant pas la moindre de celles-ci.
Les personnes dont la langue maternelle n’est pas le néerlandais sont également dans le collimateur de ce gouvernement flamand. Les nouveaux.elles arrivant.e.s de langue étrangère ayant des enfants en âge scolaire devront démontrer leurs efforts pour apprendre le néerlandais. Sans pouvoir prouver la participation d’au moins un parent à un cours, l’allocation scolaire serait supprimée. Il s’agit même du premier point de l’accord gouvernemental relatif à l’enseignement. Ce n’est qu’ensuite que la situation du personnel de l’enseignement est abordée, en termes très vagues tels que “revaloriser le statut social de la profession”. C’est très bien, mais pour cela, il faut de l’argent. Et pas un mot dans l’accord de coalition sur un plan d’investissements publics dans la formation, l’infrastructure et le personnel, ne parlons même pas d’un plan à la hauteur des nécessités. Ainsi, en ce qui concerne les infrastructures, il est seulement dit que le “rythme d’investissement sera maintenu”. En d’autres termes, il n’y aura pas de fonds supplémentaires. Les investissements massifs que le personnel de l’enseignement a réclamés au début de l’année n’auront pas lieu. Au lieu de consacrer davantage de ressources à l’enseignement supérieur, le gouvernement flamand veut limiter le nombre d’étudiant.e.s avec des examens d’entrée.
Les sanctions sont concrètes, les promesses vagues. C’est le fil rouge de l’accord de coalition. Les écoles peuvent contacter la politique sociale locale par l’intermédiaire du CLB (Centrum voor Leerlingenbegeleiding, Centre d’encadrement pour élèves en français) si “les parents ont des difficultés à assumer leurs responsabilités”. Cela suggère à nouveau que l’accent sera mis sur les sanctions plutôt que sur l’aide. Avec une politique axée sur les sanctions, il faut des petits policiers à tous les niveaux.
L’imposition de règles est complétée par le relèvement du niveau de maitrise du néerlandais obligatoire pour accéder à un logement social ou par une nouvelle pression en faveur d’une interdiction plus large du port du voile au sein du gouvernement flamand, sous prétexte que tout contact doit être perçu comme “neutre”. L’imposition de règles ne touche pas tout le monde, bien entendu. Le gouvernement veut ainsi limiter les possibilités de s’opposer aux permis de construire. Le groupe d’action Climaxi note à juste titre que “la combinaison d’un faible investissement pour le climat et d’une législation moins démocratique est pernicieuse tant pour les dossiers locaux que pour le climat international”.
Les intérêts du privé sont au cœur de l’accord de coalition. Celui-ci appelle à des politiques favorables aux PME mais, parallèlement, le gouvernement flamand souhaite examiner de près les subventions accordées aux entreprises, car elles peuvent constituer un “frein à la destruction créatrice”. C’est tout à l’avantage des grands acteurs, pas des petites structures. Cela indique clairement que les investissements publics n’ont pas d’objectif social, mais qu’ils sont orientés vers les intérêts des grandes entreprises. Il en va de même, par exemple, pour les investissements supplémentaires dans les travaux publics.
Qu’en est-il des promesses sociales ?
Les investissements supplémentaires dans l’aide sociale sont un trophée du CD&V et de Vooruit. Dix mille places supplémentaires seront ajoutées (sous conditions) dans les services de garde d’enfants. C’est moins que nécessaire, mais c’est un pas en avant indispensable. Pour le gouvernement flamand, il ne s’agit pas seulement d’un service social, mais aussi d’un “instrument important pour rendre l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée praticable”. Par ailleurs, l’accord ne contient pratiquement rien de concret sur la question de l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Sans surprise, puisque la politique liée à la Petite enfance est principalement axée sur ce point, priorité sera accordée aux travailleur.euse.s.
La réduction des droits d’enregistrement pour l’achat d’un premier logement de 3 à 2 % est présentée comme une mesure visant à rendre le logement plus abordable. Toutefois, Bart De Wever a immédiatement parlé d’un “ballon d’oxygène pour le marché”, car “on construit beaucoup trop peu en Flandre”. L’entretien de liens chaleureux avec les promoteurs immobiliers débordent de toute évidence largement le niveau anversois… L’accord de coalition stipule : “En tant que gouvernement, nous facilitons le bon fonctionnement du marché immobilier et procédons à des ajustements ciblés si nécessaire.” La nécessité d’augmenter considérablement l’offre de logements sociaux n’a pas mentionnée nulle part.
Ce n’est que lorsqu’elles s’inscrivent dans une logique de profit que les mesures sociales sont plus concrètes. D’autres propositions restent très vagues. La promesse de Vooruit d’offrir à tous les élèves un repas sain à l’école, par exemple, est sévèrement édulcorée : “Si les écoles primaires et la politique sociale locale concernée veulent apporter un soutien collectif à des repas sains à l’école, elles peuvent demander un cofinancement flamand.”
Le rétablissement partiel de l’indexation des allocations familiales intervient à un moment où l’inflation est à nouveau plus faible, de sorte que rien ne changera pour l’instant. L’allocation sociale pour les parents à faibles revenus ne sera pas indexée. Et bien sûr, rien n’est dit sur le rattrapage de la perte subie ces dernières années en raison d’une indexation incomplète, une perte estimée à un milliard d’euros. Le CD&V a eu droit à un trophée, mais il n’a pas eu le droit de coûter quoi que ce soit.
Concernant les transports en commun, il est vaguement question d’élargir l’offre. En ce qui concerne les ressources nécessaires, seuls les “engagements d’investissement du contrat de services publics avec De Lijn seront respectés”sont mentionnés. Des fonds supplémentaires pour l’entretien et le remplacement ne visent qu’à “maintenir notre infrastructure à niveau”. Cela ouvre la porte à des tarifs nettement plus élevés. Avec Annick De Ridder (N-VA) comme nouvelle ministre de la Mobilité, il est clair que le service aux usagers ne sera pas une priorité. De Ridder est une opposante notoire et acharnée des transports en commun. Il y a vingt ans, alors qu’elle était encore députée libérale, elle se plaignait amèrement des nombreux “bus vides” en circulation. Cela n’augure donc rien de bon.
La réduction des droits de succession peut sembler sociale, car de plus en plus de personnes dépendent des ressources héritées de leurs parents pour leurs vieux jours. Il est frustrant de constater qu’une grande partie de ces ressources disparaît par le biais des droits de succession. Toutefois, ce n’est pas dans la classe travailleuse que les héritages sont les plus importants. Les super-riches organisent leurs héritages de manière beaucoup plus efficace et disposent de nombreuses échappatoires leur permettant de payer moins sur les montants les plus élevés. Cela renforce et accroît les inégalités dans la société ; les héritages sont généralement la principale source de richesse pour les super-riches. Selon l’accord de coalition, la réduction de l’impôt sur les successions viserait dans un premier temps les héritages de petite et moyenne importance. Ce n’est pas encore concret et il n’y a aucune mention de la manière dont les échappatoires pour les très riches seront abordées. Toute réduction de nos droits de succession sert-elle à éviter d’avoir à parler de l’énorme machine à inégalités qu’est le droit de succession tout court ?
La suppression de la prime pour l’emploi sur les bas salaires concerne 1 million de bénéficiaires sur 2,5 millions de travailleurs. Pour l’Open VLD, c’était un point central. Cette prime complétait le salaire des travailleur.euse.s sans que le patronat ait à déverser le moindre centime. Le complément va disparaître, mais aucune pression ne sera exercée sur les employeur.euse.s en faveur de salaires décents.
En ce qui concerne les titre-services, outre l’accord de coalition, il y aurait un accord informel pour en augmenter le prix et supprimer la déduction fiscale. Cela rendra les titre-services plus chers. Seule une partie limitée de ce montant sera affectée aux salaires du personnel du secteur, qui fait pourtant campagne depuis longtemps pour de véritables augmentations de salaire.
Une opposition conséquente est nécessaire face à ce gouvernement faible
Les négociations ont été difficiles et De Wever a dû être appelé à la fin pour arrondir les derniers angles. Des fuites ont fait état de confrontations amères, y compris entre les membres de la N-VA eux-mêmes (Demir contre Weyts et Demir contre De Ridder, De Wever ayant dû intervenir). L’ancien ministre président Jan Jambon (N-VA) a été débarqué depuis longtemps, et pas seulement parce que Conner Rousseau a insisté sur ce point. Certains hommes forts de la N-VA du précédent gouvernement flamand n’ont pas obtenu de bons résultats aux élections de juin dernier. La perte de la N-VA aux élections flamandes (une nouvelle baisse de 4 sièges après avoir également perdu 8 sièges en 2019) implique que Vooruit et le CD&V ont relativement plus de poids. Pour obtenir l’adhésion de son congrès, Conner Rousseau s’en est pris violemment à la N-VA. Lors des négociations, Sammy Mahdi (CD&V) n’a pas hésité à s’adresser aux médias pour faire part de ses exigences. Même s’il parvenait à atterrir avant les élections municipales, il y a peu de chances que cela devienne un gouvernement stable et cohérent.
Le manque de moyens et les crises sont nombreux dans les domaines pour lesquels le gouvernement flamand est compétent. Dans De Standaard, Marc Reynebeau déclare : “Le sous-financement a déjà transformé de nombreux joyaux de la couronne flamande, de l’enseignement aux transports publics en passant par les soins et le logement social, en cas problématiques”Le PTB note à juste titre :“Nous traversons une crise du logement, les transports publics sont défaillants et les déficits en matière de soins et d’enseignement sont énormes. Mais malgré de longues négociations, la N-VA, le CD&V et le Vooruit ne mettent guère de solutions sur la table. En revanche, ils font de vagues promesses, sans expliquer où ils vont faire des économies”.
La FGTB se dit satisfaite des investissements annoncés dans les soins de santé, les allocations familiales, les transports publics et l’enseignement, mais “se pose encore beaucoup de questions”parce que “les budgets et l’élaboration concrète restent vagues”. La CSC réagit de la même manière et met en garde contre le fait que “la marchandisation des soins n’est pas clairement arrêtée”. Le SETCA-Non Marchand se déclare “prudemment optimiste”concernant les soins de santé et le bien-être. “Un investissement d’une ampleur sans précédent dans le non marchand flamand est annoncé”, a déclaré le SETCA, tout en reconnaissant que les chiffres exacts font encore défaut. Au sujet des attaques antisociales contenues dans l’accord de coalition, les réponses des sommets syndicaux restent bien trop discrètes, pour rester poli.
Le PTB déclare : “Nous allons faire tout ce qui est en notre pouvoir au cours des cinq prochaines années pour imposer les investissements nécessaires dans le logement, les soins de santé, les transports publics et l’enseignement”. Il s’agit d’une bonne approche, que nous ferions bien d’étoffer par des plans d’action et des perspectives de lutte.
Les défis sont énormes, les déficits continuent de se creuser et ce gouvernement va encore les augmenter. L’accord de coalition indique clairement que les partis participants partent du principe que le gouvernement Arizona sera en place au niveau fédéral. Cela signifie de nouvelles attaques contre la classe travailleuse et toutes celles et ceux qui luttent. L’opposition ne doit pas se limiter à des déclarations fortes, nous devons nous organiser sur chaque lieu de travail et dans chaque quartier pour formuler et populariser par la lutte des revendications autour des besoins à combler. C’est ainsi que nous pourrons construire un rapport de force qui nous permettra de gagner. Si nous ne le faisons pas, nous laissons la place à toutes sortes de discours et de recherche de boucs émissaires qui vont semer la discorde et la haine tout en affaiblissant la riposte de la classe travailleuse.
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Ce n’est pas en chassant les malades qu’il y en aura moins
Nous sommes beaucoup à ne pas pouvoir tenir le coup et à partir en maladie. Pour les partis de droite, la chasse est ouverte. Et toutes les personnes qui seraient susceptibles d’être complices des malades sont dans le collimateur, jusqu’aux médecins et aux compagnies d’assurance maladie.
Bien peu de gens seront épargnés. De Wever veut réintroduire le jour de carence: le premier jour de carence lors d’une maladie courte durée ne serait plus payé. Selon la super note, cette mesure est nécessaire pour “contrecarrer l’utilisation abusive de courtes périodes d’incapacité sans certificat médical”. L’idée sous-jacente, c’est que chaque personne malade à la maison est un.e suspect.e qui s’absente «abusivement». Depuis quelque temps, il n’est plus obligatoire de fournir un certificat médical pour les absences d’une seule journée dans les grandes entreprises. Les absences d’un jour ont augmenté, mais il y a eu moins d’absences courtes dans l’ensemble. Les travailleur.euse.s restent plus facilement à la maison pendant une journée, mais retournent plus rapidement au travail par la suite. L’absentéisme de courte durée a diminué en 2023 par rapport à 2022.(1) Le point de départ de la super note est donc un fantasme qui ne repose pas sur des faits.
L’attaque la plus grave concerne les malades de longue durée. Celles et ceux-ci doivent reprendre le travail le plus vite possible. Nous n’avons aucun doute quant au fait que de nombreuses malades de longue durée ne demanderaient pas mieux que de pouvoir contribuer à la société. Tout le problème, c’est de pouvoir leur fournir un travail adapté et réalisable. Quand des gens quittent le boulot, c’est généralement pour des problèmes de santé physique ou d’une surcharge nerveuse. Mais la droite ne dit rien à ce sujet. C’est la victime qui est fautive. Et faute de coopérer suffisamment à leur parcours de retour à l’emploi, on leur volera une partie de leurs allocations.
Histoire que la pression soit encore plus forte, De Wever veut contrôler les médecins et analyser les statistiques pour voir qui “prescrit des périodes d’incapacité de travail nettement plus nombreuses et/ou plus longues”, afin d’imposer une sanction financière. Protection de la vie privée? Relation médecin-patient ? Avec la N-VA, ça dégage!
Outre les médecins, les caisses d’assurance maladie sont également visées. En attendant que le contrôle de l’incapacité soit retiré aux caisses d’assurance maladie, la super note veut faire dépendre le financement de ce contrôle de “la mesure dans laquelle elles parviennent effectivement à réintégrer les malades de longue durée dans le marché du travail”. Ainsi, un médecin-conseil qui déclare un malade de longue durée inapte au travail ponctionnerait sur ses propres fonds de fonctionnement. Ce n’est pas une mince affaire en termes de conflit d’intérêts!
Pour le document de travail de l’Arizona, il faudrait passer “d’une approche essentiellement médicale à une approche multidisciplinaire et davantage axée sur le marché du travail”. Une approche médicale des personnes malades, imaginez l’horreur!
D’où vient donc cette hausse des maladies de longue durée ? Selon la Banque Nationale, l’évolution démographique des travailleur.euse.s est un facteur important: en 1999, un quart de la masse salariée avait plus de 45 ans. En 2019, il s’agissait de 42%. (2) Plus les salarié.e.s sont âgé.e.s, plus le risque de tomber malade est élevé. Plus des trois quarts des personnes malades de longue durée ont d’ailleurs 45 ans ou plus. La plus forte augmentation du nombre de malades de longue durée concerne les salarié.e.s âgé.e.s de 55 ans et plus. Ne tournons pas autour du pot: la droite veut nous faire bosser jusqu’à ce que nous tombions littéralement raides morts.
L’augmentation constante de la productivité accroît la pression au travail, ce qui entraîne davantage de burn-out et de dépressions. Près d’un quart des personnes en invalidité de longue durée souffrent d’épuisement professionnel ou de dépression. Entre 2016 et 2021, il y a eu une augmentation de 46% des cas d’épuisement professionnel et de dépression à long terme.(3). Plusieurs propositions de l’Arizona augmenteront encore le nombre de burn-out. Dans le domaine des soins de santé, par exemple, De Wever veut économiser 300 millions d’euros. Combien de travailleur.euse.s de la santé supplémentaires veulent-ils plonger dans l’épuisement professionnel en allouant des fonds insuffisants à un secteur des soins qui craque ?
La note de De Wever repose sur des préjugés à l’égard des personnes malades de longue durée: leur situation serait “de leur propre faute”, quand ce n’est pas purement et simplement leur paresse qui est épinglée. Rien d’étonnant, cela cadre parfaitement avec la vision dominante selon laquelle le burn-out ne serait qu’un problème purement individuel. Pour les patrons et les responsables politiques, cette vision ne manque pas d’intérêt, elle écarte toute responsabilité de leur part. Leur réponse peut d’autant mieux se limiter elle aussi au domaine individuel, par le biais de sanctions par exemple. De cette manière, la protection sociale passe d’une application générale à un « privilège » individuel.
Ce système nous rend littéralement malades ! La protection de la santé des travailleur.euse.s a toujours été un combat essentiel du mouvement ouvrier. La défense d’un environnement de travail et de vie sain et de salaires décents faisait partie des racines de l’organisation de notre classe sociale. Il faut des revendications offensives pour de meilleures conditions de travail, telles qu’une réduction collective du temps de travail sans perte de salaire et avec embauche compensatoire, une réduction de la pression au travail, un suivi médical des situations de travail problématiques, du personnel et des ressources en suffisance dans les secteurs où le taux d’abandon est élevé aujourd’hui.
1. Ziekteverzuim klimt naar recordhoogtes: werknemers 10 procent van de werktijd afwezig, Vrt. be, 5 janvier 2024.
2. Rising number of sick pay recipients in Belgium: causes and results of reintegration policies, NBB Economic Review 2024 No 3
3. Langdurige arbeidsongeschiktheid: Hoeveel langdurige burn-outs en depressies? Hoeveel kost dat aan uitkeringen?, riziv.fgov.be
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Marche ou crève ? On ne veut pas de cette société-là!
Que négocient les partis de droite pour le gouvernement fédéral ? La FGTB qualifie la note socio-économique de l’ex-formateur Bart De Wever (N-VA) de « plus grande régression sociale depuis 80 ans ». Ce n’est pas exagéré. Aujourd’hui, c’est Maxime Prévot (Engagés, ex-CDH) qui a repris le flambeau pour donner vie à ce catalogue des horreurs.
Les partis de la potentielle coalition Arizona discutent d’une opération totale de 39 milliards d’euros en termes d’effort budgétaire sur l’ensemble de la législature (jusqu’en 2029). Ce qui représente les 27,5 milliards d’euros d’assainissement demandés par l’Europe, avec neuf milliards en plus à dégager. C’est un montant historique en termes de casse sociale, qui vient en plus s’ajouter à tout ce qui a été économisé, tout particulièrement depuis 2008 (avec accélération durant le gouvernement Michel de 2014-2019). Dans beaucoup de services publics, on a déjà coupé jusqu’à l’os. Le personnel est sur les genoux et, que ce soit dans le public ou dans le privé, nous faisons face à une épidémie alarmante de burnouts et de malades de longue durée en raison d’une charge de travail trop intense. Réponse de la droite ? « Vous n’avez pas fini de souffrir ». Et si le MR a (temporairement) tiré la prise des négociations, c’est parce que cela n’allait pas encore assez loin.
Pour faire des restrictions, les partis de l’Arizona ont proposé de s’attaquer aux pensions (2 milliards d’euros), aux sans-emploi (1,7 milliard), au mécanisme d’indexation des salaires (600 millions), aux malades de longue durée (362 millions), aux fonctionnaires (1,8 milliard), aux réfugié.e.s (1,5 milliard), à l’enveloppe bien-être des allocations sociales (1,4 milliard), aux soins de santé (300 millions), à la SNCB (200 millions)… Le plus gros morceau (3,65 milliards) est constitué d’une large réforme du marché du travail (avec entre autres la suppression de l’interdiction de travail le dimanche et le travail de nuit compté à partir de minuit seulement) qui comporte aussi la limitation à deux ans des allocations de chômage.
Tout est imbuvable, là comme dans la Déclaration de politique communautaire en FWB (avec le personnel de l’enseignement en ligne de mire) et dans la Déclaration de politique régionale pour la Wallonie. Ce que la droite veut, c’est la loi de la jungle, avec des pauvres plus pauvres, des riches plus riches, et la haine de l’autre (tout particulièrement s’il est étranger) érigée en politique d’Etat.
La lutte des classes n’a pas disparu
Si les caisses de la collectivité sont vides et que nos services publics (« le patrimoine de ceux qui n’en ont pas », pour reprendre une expression célèbre) craquent de partout, c’est que durant des décennies, avec également la collaboration active du PS et d’ECOLO, les cadeaux fiscaux et autres n’ont pas arrêté de pleuvoir sur les plus riches et les grandes entreprises. Un gigantesque transfert de moyens a été opéré de la collectivité vers le privé.
L’an dernier, une étude d’Oxfam a démontré que l’écart entre l’extrême richesse et l’extrême pauvreté se creuse de plus en plus en Belgique. Aujourd’hui, l’élite capitaliste qui compose le 1% des plus riches du pays possède plus que 70% de la population ! Allons chercher de ce côtélà les moyens qui nous manquent pour une société qui ne laisse personne de côté ! Toujours selon Oxfam, un impôt sur la fortune rapporterait 20 milliards d’euros en Belgique. Quant à la fraude fiscale, les diverses estimations (Fonds monétaire international, ministère des Finances, centres de recherches, etc.) parlent d’un manque à gagner pour la collectivité de 20 milliards d’euros.
Les trois quarts des bénéfices des plus grandes entreprises belges vont aux actionnaires (“The Inequality Dividend”, Oxfam, 2024). Et tout cet argent, ce sont les travailleur.euses qui le produit, pas les actionnaires ! La valeur créée par les travailleurs des plus grandes entreprises actives en Belgique a augmenté de 45,5 % en 2022 par rapport à 2017. Mais au cours de cette période, les dépenses par employé dans ces entreprises n’ont augmenté que de 13 %, tandis que les dividendes ont augmenté de 23 %. C’est nous qui faisons tourner le monde ! C’est à nous de décider de la manière de le faire !
Organisons la riposte !

Ne perdons pas de temps et discutons sur tous les lieux de travail de cette note de malheur et de la manière de combattre la casse sociale. Des assemblées générales de tout le personnel peuvent assurer d’impliquer le plus possible de collègues autour des délégations syndicales. Nous connaissons déjà la prochaine date de mobilisation : une manifestation nationale est prévue le 16 septembre à Bruxelles en solidarité avec les camarades d’Audi menacés par la fermeture du site. Si l’on s’attaque à l’un.e d’entre nous, on s’attaque à nous tous.tes !
L’unité dans la lutte, c’est aussi la meilleure façon de repousser les préjugés sexistes, racistes, islamophoes, LGBTQIA+phobes ou validistes qui sont distillés consciemment par la droite et l’extrême droite. Combattre chaque oppression, y compris dans nos rangs, fait partie intégrante de la construction d’une solidarité active. De sombres perspectives d’austérité s’annoncent à tous les niveaux de pouvoir, y compris dans les communes dont de nombreuses sont sous tutelle financière de la Région bruxelloise ou du Centre régional d’aide aux communes, le “FMI wallon”. Nous devrons nous battre, en tirant les leçons des faiblesses passées du combat anti-austérité, pour briser la camisole de force budgétaire, où qu’elle puisse se trouver, et pas seulement aux niveaux du fédéral et des régions.
La crise du climat et de la biodiversité illustre particulièrement bien la nécessité de la propriété publique des moyens de production. Les crises du logement, de la santé ou de la précarité au travail l’illustrent tout autant. Il ne manque pas de richesses pour un programme d’urgence sociale, mais elles sont concentrées dans les mains d’une poignée d’ultra-riches. Appliquer un tel programme nécessite de se préparer à la riposte inévitable de la classe dominante dont les intérêts seront mis en danger.
À chaque capitaliste qui essaie de s’échapper par la fuite de capitaux ou la délocalisation d’entreprises : opposons-lui l’expropriation ! Et dans ce titanesque bras-de-fer, notre classe sociale pourra brandir l’arme de la nationalisation des secteurs-clés de l’économie, sans rachat ni indemnité, et placés sous le contrôle et la gestion démocratique de la classe travailleuse et de la collectivité, afin d’élaborer une planification rationnelle et démocratique de l’économie – à commencer par le secteur bancaire et financier, mais aussi l’énergie, les télécoms, la sidérurgie, la pétrochimie,… Sur cette base les moyens seront dans nos mains pour planifier l’économie et la transition écologique.
Nous ne sortirons véritablement victorieusement de ce combat que par le renversement du capitalisme. Un changement fondamental et révolutionnaire de la société s’impose, c’est-à-dire la fin de la propriété privée des grands moyens de production et d’échange. Rejoignez nous dans ce combat urgent en faveur du socialisme démocratique.
Agenda :
- 16 septembre : Manifestation de solidarité avec les travailleur.euses d’Audi à Bruxelles. 10h, Gare de Bruxelles-Nord.
- 21 septembre : Manifestation antifasciste à Anvers contre une manifestation de Voorpost (le service d’ordre du Vlaams Belang), 14h, De Coninckplein.
- 13 octobre : Elections communales. En dépit de nos divergences, nous appelons à voter pour les camarades du PTB, nous sommes convaincu.e.s que leur résultat sera de nature à construire la confiance du mouvement social pour aller en lutte contre la droite et son programme (lire notre appel de vote).
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L’offensive de la droite est-elle une fatalité ? Tout dépendra de la résistance sociale, de son organisation et de son programme
“Ni rire, ni pleurer, ni haïr, mais comprendre”, disait Spinoza. Le lundi 10 juin avait des airs de rude gueule de bois. Si l’extrême droite n’était pas première formation en Flandre, elle finissait d’un cheveu en deuxième position derrière la N-VA et se retrouvait tout de même première à l’Europe. Du côté francophone, la percée de la droite fut une désagréable surprise. L’heure est au bilan, mais dans la perspective directe de la préparation d’une lutte de classe acharnée.
Interrompre la lutte sociale pendant la campagne électorale, une erreur dramatique
Au lendemain des élections, Syndicats Magazine (FGTB) s’était entretenu avec Jean Faniel, docteur en sciences politiques et directeur général du CRISP (le Centre de recherche et d’information socio-politiques). Au milieu d’une série de remarques pertinentes, Jean Faniel soulignait que “le travail et surtout la “valeur travail” ont été accaparés par le MR et Les Engagés. (…) Certes, la droite a attaqué les travailleurs inactifs, mais visiblement, ça a payé.”(1)Cette analyse conduit à une dangereuse pente glissante, qui veut que l’on s’adapte à la rhétorique de droite au nom d’une prétendue “droitisation” de la population.
C’est vrai, la limitation dans le temps des allocations de chômage a figuré parmi les thèmes centraux de la campagne, dans tout le pays. Mais soyons clairs : quand la lutte collective ne semble pas offrir d’issue ni de perspectives de taper vers en haut, le cul-de-sac débouche sur la recherche de solutions individuelles et le déversement de la colère vers en bas. Vers celles et ceux qui sont déjà les plus démuni⸱es au lieu de la classe dominante. Les sommets syndicaux ne doivent pas chercher à éluder leurs responsabiltiés : en refusant d’organiser la lutte sociale durant la campagne électorale afin de ménager les “parti-amis”, un boulevard a été ouvert à la droite.
Se préparer au combat sans attendre
Aujourd’hui, le président de la FGTB Thierry Bodson explique que “l’on ne va pas mobiliser sur des craintes, on ne va pas mobiliser maintenant parce qu’il faut respecter le résultat des élections. On va mobiliser au moment où les gens prendront conscience de ce qu’il y a dans les programmes, et s’il y a des reculs sociaux importants, alors nous mobiliserons.”(2) Nous savons déjà qu’il va y avoir des reculs importants. Les Engagés, le MR et la N-VA sont favorables aux travaux d’intérêt général imposés après 2 ans de chômage. Leurs programmes fourmillent d’attaques antisociales aussi dure que l’introduction d’un système de pension à points, accompagnées d’une offensive sur les libertés syndicales. En Wallonie, Bouchez et Prévot ont tenu à rencontrer en premier lieu les représentants des organisations patronales flamandes Unizo et Voka. On se rappelle que Bart De Wever avait déclaré en 2010 que“le Voka est mon patron”, ce qui donne tout de suite une indication inquiétante de la teneur des discussions. Le tableau aurait été déjà bien sombre, même sans y ajouter les injonctions austéritaires de la Commission européenne.
Nous rejoignons cependant Thierry Bodson sur l’estimation qu’une mobilisation lancée à la hâte n’est pas la meilleure option. Mais nous pensons qu’il faut la préparer de toute urgence, sans attendre que le choc des attaques fasse évoluer la conscience. La grande grève générale de l’hiver 60-61 avait été précédée d’une “opération vérité” avec meetings publics et assemblées syndicales pour percer à jour les mensonges de la droite et des grands patrons, tout en préparant la classe travailleuse à la lutte. Un boxeur n’attend pas le premier uppercut pour se mettre en mouvement, pas plus qu’il n’entre sur le ring sans s’être étiré au préalable. Il n’en va pas autrement ici.
Pour quel type de combat ? Une manifestation de masse ou une journée de grève nationale pour “faire pression” ne suffira pas. Dans le magasine Knack (11 juin), Theo Francken (N-VA), le grand ami de George Louis Bouchez, a tenu à mettre les points sur les “i” : “Bien entendu, nous nous attendons à ce que la FGTB et les autres syndicats préparent déjà une série de grèves – pourquoi pas une grève de 10 jours tout de suite ? Qu’ils le fassent.” Ce qu’il nous faut, c’est un plan d’action en escalade, réfléchi et discuté largement à la base, avec des dates connues suffisamment à l’avance, où chaque mobilisation (tournée de manifestations ou de grèves par province, manifestation nationale de masse,…) prépare déjà la suivante.
“Ne perdez pas de temps dans le deuil. Organisez-vous!”
C’est ce que disait le pionnier du syndicalisme américain Joe Hill. Une des grandes différences par rapport à 2014 et la coalition de droite dure du gouvernement Michel, c’est que le PTB est aujourd’hui devenu un parti de plus de 25.000 membres, le quatrième plus grand parti au niveau fédéral, avec une progression remarquable à Bruxelles, moins marquée en Flandre et un tassement en Wallonie. Nous nous réjouissons bien entendu de ces résultats, tut en soulignant que le résultat en Wallonie est un avertissement à analyser sérieusement.
La campagne, du PTB comme celle des autres partis, s’est beaucoup jouée sur les réseaux sociaux, notamment en raison de l’impressionnante masse de primo-votants (entre 600 et 800.000 jeunes de 16 à 23 ans). Le grand inconvénient d’un tel type de campagne est qu’il entretient la passivité. La force des campagnes passées de Bernie Sanders aux Etats-Unis, de Jeremy Corbyn au Royaume-Uni ou encore de Mélenchon en France, c’était particulièrement cette dynamique de meetings de masse qui cherchaient à transformer le soutien passif en activisme et pas seulement en recrutement.
Le PTB a obtenu des résultats plus appréciables dans les villes, où résident des couches populaires, mais aussi où des luttes sociales existent. Comme à Anvers, le bastion du Vlaams Belang, où le PTB est parvenu à dépasser Tom Van Grieken et ses sbires pour atteindre la deuxième place avec 22%. La dynamique de lutte autour de Gaza et la place qu’y occupe le PTB n’y est pas étrangère.
Pour optimiser au maximum le résultat des élections de juin dans celles d’octobre, se plonger sans équivoque dans le débat sur la stratégie à adopter contre la droite sera crucial. Mais il faut plus. Il faut l’essentiel. Il faut un programme de transformation de toute la société. Si nous ne rejoignons pas Thierry Bodson sur l’ensemble de son analyse précitée, il a raison sur un point fondamental : “La gauche n’avait pas de projet de société, juste une compilation de mesures.” A force de vouloir se montrer respectable, le PTB a pu passer pour un parti à la gauche du PS sans en être fondamentalement différent.
Le programme de la gauche radicale doit partir des nécessités sociales, pas de ce qui serait permis par les institutions du capital. Nous ne devons pas faire de concession à leur discours : tout pointe vers l’urgent besoin d’un autre système de production. Ça, c’est le véritable “choix de la rupture”. Le chemin est encore long, mais la meilleure manière de convaincre du sérieux de la gauche radicale, c’est d’être clair quant à la destination, celle du socialisme démocratique, celle d’une véritable démocratie qui est aussi une démocratie économique, où les producteur⸱trices de richesses décident ensemble de leur utilisation. A ce titre, les actions de la campagne d’activistes et de syndicalistes de Bruxelles “Commune colère”(3), qui défendait la “socialisation des biens communs” tels que l’énergie, est une excellente source d’inspiration.
Nous avons besoin d’une campagne de combat vers les élections d’octobre – de la part de la gauche politique et syndicale – qui développe notamment comment des “communes rebelles” dirigées par coalitions de gauche pourraient constituer des avant-postes de la résistance sociale face à l’austérité décidée aux autres niveaux de pouvoir.
1) Jean Faniel: “Une gauche qui n’a pas fait rêver”, syndicatsmagazine.be, 18 juin.
2) Thierry Bodson (FGTB) : “Certains citoyens vont vite comprendre qu’on leur a vendu du rêve, et qu’ils ont été trompés sur la marchandise”, interview de Thomas Gadisseux sur La Première, rtbf.be, 17 juin.
3) commune-colere.be