Tag: L’Arizona, un projet brutal contre notre classe sociale. Se révolter & s’organiser pour gagner!

  • Lutter comme en 2014… et aller au bout

    Les militant.es syndicaux qui ont déjà une certaine expérience font souvent référence aux luttes de 2014 comme un modèle du type de lutte qui s’impose aujourd’hui. S’y attarder un moment est bien utile, histoire de rafraîchir les mémoires et de présenter aux jeunes militant.e.s la lutte qui a connu la plus grande journée de grève générale de l’histoire de Belgique.

    Par un délégué de la FGTB en Flandre 

    Le contexte de la Coalition suédoise

    Le combat de 2014 était mené contre la coalition « suédoise » composée des libéraux, de la N-VA et du CD&V. Ce gouvernement de droite dure dirigé par Charles Michel (MR) et Bart De Wever en tant que Premier ministre fantôme a marqué une rupture avec les gouvernements précédents dirigés par Di Rupo, Leterme ou encore Van Rompuy, chacun d’eux étant issu de familles politiques traditionnelles. Suite à la crise financière de 2008, les banques ont été renflouées grâce à des fonds publics, une sorte de «socialisme pour les riches». La crise économique qui a suivi a entraîné une augmentation de la dette publique et des déficits budgétaires.

    Le gouvernement Di Rupo (2011-2014) a ouvert la voie aux premières mesures d’austérité. L’allocation d’insertion destinée aux jeunes ayant quitté l’école a été limitée dans le temps, constituant ainsi une nouvelle attaque contre les chômeur.euses. Face à la perspective d’une série d’attaques antisociales, une manifestation de masse rassemblant entre 60.000 et 80.000 personnes a eu lieu avant même l’entrée en fonction du gouvernement, en décembre 2011. La FGTB a brandi la menace d’une grève générale, qui a effectivement eu lieu en janvier 2012. Mais quelques concessions limitées de la part du PS ont suffi pour que la direction syndicale ne donne pas suite au mouvement.

    En 2014, la N-VA a remporté les élections avec 32% des voix tandis que, du côté francophone, le MR a gagné du terrain vis-à-vis du PS. De Wever a saisi l’occasion de former un gouvernement d’austérité brutale. La chose ne manquait pas d’intérêt pour la classe dominante qui pouvait ainsi toujours avoir en réserve une nouvelle coalition tripartite traditionnelle et, entre-temps, ramasser tout ce que De Wever, Michel et leur bande pouvait voler de nos conquêtes sociales.

    Au nom de la nécessité de «mettre de l’ordre» et de «s’attaquer au déficit budgétaire», une attaque en règle contre la classe travailleuse a été lancée. Au programme: relèvement de l’âge de la pension de 65 à 67 ans, accélération de la diminution des allocations de chômage, saut d’index contre les salaires… Imaginez qu’un.e travailleur.euse commençant à l’époque à travailler pour un salaire moyen, ce saut d’index signifie jusqu’à 30.000 euros de moins sur l’ensemble de sa carrière !

    Si le déficit budgétaire a diminué, c’est d’ailleurs uniquement en raison de la croissance économique. Ce qui a été volé aux salarié.es est allé directement dans les poches du patronat, qui ont reçu une pluie de cadeaux fiscaux.

    L’idée d’un plan d’action se concrétise

    L’objectif du gouvernement était également d’affaiblir fondamentalement la force de frappe des syndicats. Les dirigeants syndicaux l’avaient bien compris, ce qui a conduit à une situation exceptionnelle où un plan d’action clair, simple et solide a été annoncé en front commun. Avant même la formation du gouvernement fédéral, une concentration militante a regroupé entre 6.000 et 7.000 personnes.

    Auparavant, un «plan d’action» était un concept défendu par les organisations et activistes de gauche. L’idée est qu’un plan permet d’intensifier les actions, en utilisant chaque étape comme tremplin vers la prochaine jusqu’à atteindre la grève générale.

    Lors de réunions interprofessionnelles dans les grandes villes, des délégué.es de tous les secteurs se sont réuni.es pour harmoniser leurs positions. Une campagne d’information, présentée sous la forme d’un « journal des pensions », a été tirée à un million d’exemplaires avec une foule d’arguments en béton et une série de revendications claires. Ce fut d’une grande aide pour mobiliser parmi les collègues.

    Une manifestation de masse réunissant jusqu’à 150.000 participants le 6 novembre, la plus grande manifestation syndicale depuis 1986, a marqué le coup d’envoi de la campagne. La colère était aussi alimentée par les révélations concernant les fraudes commises par les super-riches, telles que les «Luxleaks», ainsi que par la manière dont Marc Coucke avait vendu sa société Omega Pharma pour 1,4 milliard d’euros sans payer un seul centime d’impôt. Cette manifestation a été le point de départ de trois journées de grèves provinciales tournantes, chaque semaine dans deux provinces à la fois, en préparation d’une grève générale nationale le 15 décembre.

    Impliquer plus largement

    Une dynamique d’action sérieuse attire directement d’autres groupes dans son orbite. Cela a été particulièrement évident lors de la manifestation du 6 novembre 2014, à laquelle ont également pris part des artistes, des jeunes, des travailleur.euses indépendants, etc. Des études ont montré que 16% des manifestant.es n’étaient pas syndiqués.

    Par ailleurs, la jeunesse était passée à l’action en Flandre contre l’augmentation du minerval. Le PSL a joué un rôle actif dans le développement de groupes d’action au sein de diverses écoles à Gand, qui ont organisé des sit-ins et des manifestations, suivis d’assemblées générales. La mobilisation de la jeunesse a fait partie intégrante du mouvement, notamment lors de la manifestation du 6 novembre, où un important contingent de jeunes était présent, certain.es se rendant par la suite à bicyclette faire la tournée des piquets de grève en solidarité.

    L’extension de la mobilisation s’est toutefois principalement manifestée sur le lieu de travail, grâce à une campagne d’information accessible, mais aussi aux assemblées du personnel. Grâce à cela, tous les collègues ont été touché.es et les réunions ont permis de répondre à leurs questions et de discuter des prochaines étapes des actions à entreprendre. En 2014, tout comme aujourd’hui, la pratique des réunions du personnel avait été mise en veilleuse par les appareils syndicaux, mais elle a repris de la vigueur sur base du plan d’action. Cela s’est traduit, entre autres, par le nombre record de 132.750 candidat.es aux élections sociales de 2016.

    Un mouvement de masse permet d’arracher des choses impossibles en temps normal. La popularité du gouvernement de droite a fondu comme neige au soleil en 2014. Rétrospectivement, De Wever a reconnu ce que les marxistes avaient déjà observé en décembre 2014, à savoir que le «gouvernement des riches» était en train de vaciller. En même temps, la popularité de revendications telles que l’impôt sur la fortune des super-riches a augmenté: une majorité se dégageait en sa faveur jusque dans l’électorat de la N-VA et du MR! Ce large soutien a permis l’adoption de méthodes d’action audacieuses. Des zones industrielles entières ont été bloquées, y compris l’ensemble de la zone industrielle autour de l’Escaut à Anvers.

    Le patronat contre-attaque

    Le patronat a immédiatement tenté de créer la division chez les travailleur.euses, notamment en accordant des primes au travail volontaire. Patronat et gouvernement ont intensifié la pression sur les directions syndicales, notamment dans le cadre de l’accord interprofessionnel qui devait être conclu au début de 2015, avec la promesse d’un transfert fiscal du capital vers le travail. Ils ont également su utiliser le contexte des attentats contre Charlie Hebdo en janvier 2015 pour détourner l’attention des enjeux sociaux.

    Des doutes sont donc apparus quant à la possibilité de poursuivre le mouvement en le faisant grandir. À ce stade, l’idéal aurait été d’évaluer la situation en réunions du personnel sur chaque lieu de travail, avec ensuite une grande réunion nationale en janvier au cours de laquelle un deuxième plan d’action aurait pu être annoncé. Ce plan aurait pu inclure, par exemple, des grèves provinciales de 48 heures, menant à une grève générale nationale de 48 heures, puis de 72 heures.

    Attendre les élections n’est pas la bonne idée

    Les directions syndicales n’avaient aucun projet en ce sens et se sont, à quelques exceptions près, concentrées sur la manière de faire atterrir le mouvement. Les appels en faveur d’une fiscalité plus équitable ont commencé à occuper le devant de la scène, mais sont restés vagues. Cela a permis au gouvernement de proposer un «tax shift», mais qui fut finalement un virage fiscal adapté aux exigences des grandes entreprises. Un accord interprofessionnel prévoyant une norme salariale de 0,8%, bien que très modeste, a obtenu une courte majorité au sein du conseil de la CSC, grâce à diverses manoeuvres.

    Des actions ont encore eu lieu dans certains secteurs tandis qu’en guise de nouveau « plan d’action », une série d’actions modestes et symboliques a été proposée. Cela a fait le lit d’une large démoralisation, qui a permis au gouvernement de se redresser. Le potentiel de combativité n’a pas été éliminé pour autant: en octobre de la même année, une manifestation organisée à l’occasion du premier anniversaire du gouvernement Michel a encore rassemblé entre 80.000 et 100.000 personnes. Sans mots d’ordre clairs malheureusement. En 2018, la tentative d’imposer un système de pension à points a directement été enterrée grâce à un sursaut de nouvelles protestations syndicales.

    Entre-temps, les directions syndicales ont de plus en plus soutenu qu’il était nécessaire d’attendre les prochaines élections pour présenter la note aux partis de la coalition suédoise. Ces derniers ont effectivement été sanctionnés en 2019. Les thèmes sociaux étaient présents lors des élections, ce qui a conduit à la première percée nationale du PTB. Cependant, le recul du mouvement a particulièrement permis à l’extrême droite de capitaliser sur le mécontentement en Flandre, entraînant un retour spectaculaire du Vlaams Belang.

    Leçons d’hier pour aujourd’hui

    Malgré les attaques visant le droit à l’action collective, y compris le droit de grève, ainsi que les défaites subies, comme chez Delhaize ou Audi Brussels, la force organisationnelle des syndicats demeure intacte. Les manifestations du 13 janvier et du 7 novembre (dans les secteurs public et non-marchand) ont révélé le potentiel d’un nouvel élan de la lutte. Un plan d’action est essentiel et pourrait également engendrer d’autres dynamiques, le lien avec la protestation contre le génocide en Palestine étant ici manifeste.

    Des assemblées du personnel et des réunions militantes sont indispensables pour permettre à la base de contrôler la manière dont les actions se poursuivent, y compris comment et quand elles sont arrêtées. L’engagement actif constitue également la meilleure réponse aux tentatives de division. En affinant et en précisant nos revendications, nous pouvons éviter que nos préoccupations ne soient placées sur une voie de garage comme cela s’est produit avec le «tax shift» de 2015.

    Le mouvement de 2014 n’a pas réussi à mettre fin aux attaques, mais il a réussi à ébranler un gouvernement de droite provocateur. Cela offre un aperçu de ce qui est possible pour une classe travailleuse en mouvement. 

  • Les salaires dans le collimateur… Il est temps de riposter !

    L’action syndicale réussie du 13 janvier a montré qu’il y a une grande volonté de stopper l’agenda de droite de la coalition Arizona. Dans les services publics en particulier, l’enseignement néerlandophone et les transports publics en tête, un signal fort a été envoyé à l’élite politique: ses politiques de démolition se heurteront à une forte résistance. Pour les dirigeants syndicaux, cela devrait être le signal du lancement d’un plan d’action sérieux unissant l’ensemble de la classe ouvrière de notre pays dans sa lutte contre les intérêts du capital.

    Par Frederik De Groeve, délégué syndical et co-initiateur du comité de grève de Gand-Sud en 2014

    L’organisation patronale Flamand Voka, avec d’innombrables commentateurs dans son sillage, a crié son incompréhension à l’annonce de cette grève «prématurée ». Après tout, aucun gouvernement n’a encore été formé, alors, selon le raisonnement, pourquoi se mettre en grève? L’objectif du Voka & co est de jeter du sable dans les yeux des travailleurs et de discréditer les syndicats autant que possible. Après tout, la liste des attaques de la droite contre la classe ouvrière est connue depuis longtemps et la meilleure réponse est d’impliquer le plus grand nombre possible de personnes dans la résistance. La journée d’action du 13 janvier était donc une étape indispensable dans la construction d’un mouvement capable d’arrêter ce gouvernement avant même qu’il n’ait eu la chance d’atteindre sa vitesse de croisière.

    Qu’est-ce que De Wever & co nous réservent? Un petit échantillon de la liste des horreurs.

    Malgré une augmentation considérable des marges des profits, De Wever veut continuer à interdire les négociations salariales libres, comme le prévoit la détestable loi sur les normes salariales. Ce transfert de plusieurs milliards d’euros n’est toutefois pas suffisant (il ne le sera jamais !) pour le patronat. C’est pourquoi le prochain gouvernement veut à nouveau grignoter l’index santé déjà limité en le calculant sur une moyenne de 12 mois au lieu des 4 mois actuels. Concrètement, il veut nous faire payer les hausses de prix à la caisse pendant une année entière sans adapter nos salaires ou nos avantages en conséquence. De plus, en cas de forte inflation (+4%), c’est-à-dire lorsque nous avons le plus besoin de l’index, une restriction supplémentaire serait introduite pour les salaires supérieurs à la moyenne (c’est-à-dire pour la moitié des travailleurs !), tandis que les bénéfices des actionnaires et les dividendes ne seraient pas touchés.

    Le travail de nuit ne commencera à l’avenir qu’à partir de minuit au lieu de 20 heures, ce qui entraînera d’importantes pertes de salaire. La semaine de travail pourra être portée à 48h sans que les syndicats puissent y veiller. Retour progressif à l’époque de Daens?

    La coalition Arizona veut nous faire avaler cette pilule amère en mettant en œuvre une réforme fiscale qui nous permettrait d’augmenter notre salaire net. Cependant, lorsqu’on commence à regarder qui paiera pour ce transfert fiscal, la tromperie de De Wever devient vite évidente. En effet, outre les attaques contre l’index, ils veulent faire passer le taux de TVA de 6 à 9% et augmenter les accises sur les carburants. De plus, ces augmentations de taxes seraient exclues du calcul de l’index! Ce que nous obtenons en plus en termes nets, nous le perdrons doublement sous la forme d’autres taxes.

    De plus, le tax shift représente une nouvelle attaque contre les moyens des services publics et de la sécurité sociale, déjà sous-financés. La part indirecte de nos salaires, qui est utilisée pour les hôpitaux, les garderies, les écoles, les pensions et autres prestations, diminue encore. Les listes d’attente déjà scandaleusement longues pour les soins de santé et les services publics vont tout simplement s’allonger sous ce gouvernement. C’est le terreau idéal pour renforcer la haine et la division au sein de la société. Le Vlaams Belang du côté néerlandophone n’a plus qu’à récolter les fruits pourris de cette coalition lors des prochaines élections.

    Organiser la résistance

    Les syndicalistes combatifs ont aujourd’hui la responsabilité d’organiser la résistance contre ce gouvernement de droite et de former ainsi l’épine dorsale d’un mouvement social plus large prônant un modèle de société différent et socialiste. La lutte à venir ne doit pas seulement viser à jeter cette coalition de droite à la poubelle. Nous devons également avoir l’ambition de construire une alternative. Un premier pas nécessaire pour cela est de renforcer les liens entre les syndicalistes combatifs en mettant en place des comités de grève, au-delà des frontières de son lieu de travail. Nous devons tirer les leçons du mouvement de 2014 et oser aller de l’avant là où nous nous sommes arrêtés. Si nous restons les bras croisés, nous avons perdu d’avance. Si nous nous battons, nous pouvons gagner !

    Tous nos articles ‘Arizona’

  • Plus de militarisation, moins de droit de résistance et d’organisation

    L’Arizona veut mener une politique de droite dure. Les mesures vont encore plus loin que celles du précédent gouvernement de droite, Michel I (2014-2018). La liste complète du Voka et de la FEB est sur la table: des attaques voraces contre l’indexation et les pensions, des impôts moins progressifs, des coupes dans à peu près tous les services publics.

    Par une militante de la CSC

    Plus de militarisation

    Selon Theo Francken, la sécurité «douce» et la sécurité «dure» doivent être mieux équilibrées. Il entend par là que la sécurité sociale, les pensions, les soins de santé, les allocations de chômage …. devraient être progressivement supprimés, tandis que davantage de ressources seraient consacrées aux dépenses militaires. Les services publics qui ont déjà été réduits à néant seront encore esquintés par le gouvernement Arizona, notamment par la poursuite de la privatisation et de la commercialisation. Tous les postes de dépenses seront réduits, à l’exception des dépenses militaires.

    On parle de 4 milliards d’euros supplémentaires par an pour la défense, notamment pour les drones de bombardement et les nouveaux avions de chasse F-35. Des investissements qui profitent essentiellement à l’industrie privée de l’armement. On peut également se demander ce que l’on fera de toutes ces armes de haute technologie extrêmement coûteuses qui ont principalement des applications offensives et n’ont donc pas grand-chose à voir avec la « défense nationale ».

    Attaques contre les syndicats

    L’affaiblissement des syndicats et de la concertation sociale est un élément clé de la liste de souhaits de la coalition Arizona. Lors des élections sociales, plus de 60 000 travailleurs se présentent chaque fois aux conseils d’entreprise (CE) et aux comités pour la prévention et la protection au travail (CPPT) pour représenter et défendre leurs collègues.

    Grâce à l’organisation et à la lutte collectives, il est souvent possible d’obtenir de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail que si c’était chacun pour soi. Lorsque le syndicat est fort, les salaires sont plus élevés et les conditions de travail sont plus favorables et plus praticables. Les patrons préfèrent donc généralement se débarrasser des syndicats. La lutte syndicale reste le moyen le plus positif pour les travailleurs de s’organiser et de réclamer leur part du gâteau.

    Les délégués et les candidats aux élections sociales bénéficient aujourd’hui d’une protection contre le licenciement. L’«amende» pour non-respect de cette protection s’élève aujourd’hui à au moins deux ans et demi de salaire. Les grandes multinationales, en particulier, paient parfois cette amende pour empêcher le développement d’une équipe syndicale militante. En fin de compte, cela leur coûte moins cher qu’une convention collective négociée de manière militante ou qu’un investissement pour améliorer les conditions de travail. En particulier dans la période précédant les élections sociales – connue dans les cercles syndicaux sous le nom de « soldes » – il apparaît que même les protections actuelles sont inadéquates.

    L’Arizona prévoit de réduire considérablement les protections des délégués et des candidats aux élections sociales, ce qui les mettait dans des « supersoldes» permanentes, avec des conséquences désastreuses. Il s’agit d’un tremplin pour réduire ensuite les indemnités de licenciement pour tous : la supernote évoque un maximum d’un an !

    De plus, De Wever et Bouchez veulent ouvrir des discussions sur le droit de grève, et le droit à la protestation collective sera également remis en question. Enfin, il est toujours question d’introduire la personnalité juridique pour les syndicats.

    Moins d’allocations de chômage

    L’Arizona remet en cause le paiement des allocations de chômage par les syndicats. C’est un moyen d’affaiblir les syndicats, même s’il ne s’agit pas d’une mesure d’économie – cela coûterait plus cher au gouvernement. À court terme, il entraînerait des licenciements collectifs au sein des syndicats  tout le personnel administratif chargé de gérer les allocations de chômage se retrouverait au chômage. À plus long terme, elle affaiblirait en partie la plus force des syndicats, à savoir le nombre d’affilié.es.

    De nouvelles restrictions des allocations de chômage sont également bénéfiques du point de vue du clientélisme : elles exercent une pression à la baisse sur les salaires (les chômeurs sont contraints d’accepter de mauvais emplois) ET elles affaiblissent indirectement les syndicats.

    Des partis hypocrites

    CD&V, Les Engagés et surtout Vooruit ne manqueront pas de se féliciter bientôt en affirmant que, grâce à eux, «le pire a été évité». Au lieu des 10 pas en arrière prévus, il n’y en aura que cinq (et quatre autres ont été quelque peu reportés). Le fait est que, ce faisant, ils favorisent la régression. Ils parlent de « prendre leurs responsabilités », c’est-à-dire qu’ils préfèrent s’emparer de quelques postes ministériels plutôt que de tirer un trait sur la situation.

    Les syndicalistes ne doivent pas se faire d’illusions sur les partis qui ont été considérés comme des partenaires politiques de la lutte syndicale dans le passé. Au contraire, il faut rompre tous les liens qui subsistent avec ces partis afin que la lutte pour la justice sociale et économique puisse être menée à partir d’une position politiquement indépendante. Ce faisant, il faut concevoir un plan d’action qui ne se contente pas de renverser le gouvernement et qui ne se contente pas de mener une lutte défensive pour freiner le déclin, mais qui propose également des revendications offensives permettant de faire des pas en avant !

    Tous nos articles ‘Arizona’

  • Sur le rail : « la plus grande grève depuis l’introduction du service minimum »

    La manifestation et les actions de grève de lundi ont été remarquables. Dans le secteur de l’enseignement néerlandophone, la participation a été phénoménale. Aux chemins de fer aussi, la grève a été très suivie, et beaucoup sont venus manifester. Cela montre la colère que suscite les attaques que l’Arizona veut mettre en œuvre. Nous en avons discuté avec un accompagnateur de train.

    La journée d’action a-t-elle été un succès sur votre lieu de travail ?

    “Oui, sur de nombreux lieux de travail, en particulier dans les services opérationnels, nous avons des taux de grévistes compris entre 75 et 100 %”.

    “En termes d’impact sur le trafic ferroviaire, il s’agit de la plus forte grève depuis l’introduction du service minimum. Moins d’un quart seulement du nombre normal de trains a circulé. Sans que les blocs de signalisation ne soient fermés. Sur certaines lignes, il n’y a tout simplement eu aucun train. La couverture dans la presse bourgeoise est trompeuse ou mensongère”.

    “Nous avons été d’une certaine manière victimes de notre propre succès. De nombreux manifestants n’ont pas pu se rendre place de l’Albertine parce qu’ils n’avaient pas de moyen de transport ou parce que leurs enfants étaient à la maison en raison de la fermeture de l’école ou de la crèche. Cela souligne une fois de plus l’importance des services publics”.

    “La grève a tout de même renforcé la manifestation. J’estime qu’environ 500 cheminots ont participé à la manifestation. Ca s’est déjà produit au début de ma carrière. Plus de 10 % de mon dépôt s’est également rendu à Bruxelles. D’habitude, seuls quelques militants le font. Beaucoup étaient en grève ou manifestaient pour la première fois. Dans mon dépôt, même la moitié des nouveaux collègues ont fait grève. C’est rare”.

    Que signifie l’Arizona pour vous et vos collègues ? S’agit-il uniquement des pensions ?

    “Il y a trop de choses à énumérer. Cela signifie travailler plus longtemps pour des centaines d’euros de pensions en moins. Dans le cas du personnel roulant, jusqu’à 12 ans de plus ! La suppression de l’interdiction du travail du dimanche et du travail de nuit à partir de minuit au lieu de 20 heures mettra en danger les primes. En net, pour les accompagnateurs de train par exemple, ce sont des centaines d’euros qui sont dans le collimateur chaque mois. Aujourd’hui, nous conservons 100 % de notre prime forfaitaire pendant les six premiers mois de maladie. L’Arizona veut faire passer ce pourcentage à 60 % après un mois seulement. Il suffit d’avoir subi une intervention chirurgicale importante ou d’être gravement malade. Cela pousse les gens dans la pauvreté !”

    “Notre employeur juridique est HR Rail. L’Arizona veut le supprimer. La SNCB et Infrabel vont-elles reprendre notre statut ? Ou est-ce qu’on va nous mettre sous le nez un contrat encore plus mauvais ? Qu’en est-il de l’assurance hospitalisation pour les cheminots actifs et retraités ? On veut supprimer notre mutualité. Le gouvernement a l’argent de notre caisse de solidarité sociale dans le viseur. Et pour affaiblir l’arme qu’est la grève, il veut introduire la réquisition des grévistes”.

    Cette manifestation a été une réussite, qu’est-ce qu’il faudrait construire maintenant ?

    “Avec le plan de départ, nous aurions probablement été à la tour des pensions avec quelques milliers de militants. La pression de la base pour aller de l’avant était forte. Des préavis de grève ont été déposés aux chemins de fer, à la STIB et dans le secteur de l’enseignement néerlandophone. Cela s’est traduit non seulement par une forte participation dans ces secteurs, mais aussi par leur fermeture en grande partie. La concentration s’est transformée en manifestation. Peu à peu, des préavis de grève ont été déposés, par exemple, à la poste et dans les prisons. Le potentiel de croissance du mouvement est énorme”.

    “Dans tous les secteurs nous avons besoin de tracts expliquant concrètement les attaques prévues, de réunions du personnel avec des arrêts de travail pour parler du type d’actions dont nous avons besoin et des exigences que nous formulons à l’égard de l’Arizona. Des grèves mensuelles de 24 heures ne suffiront pas.”

    “L’âge légal de la pension est déjà trop élevé. La plupart des pensions sont trop faibles. De nombreux métiers sont pénibles sans possibilité de pension anticipée. Il faut répondre au soi-disant besoin d’austérité budgétaire. Par exemple en pointant du doigt les réductions de l’impôt sur les sociétés qui nous privent de 16 milliards d’euros par an. Et en surmontant les divisions entre les fonctionnaires, les petits indépendants et les employés du privé.”

  • Violentes attaques de l’Arizona – Une résistance acharnée s’impose !

    Attention aux voleurs ! L’Arizona veut nous faire les poches !

    Les versions successives de la “supernote” ont toutes été brutales et inacceptables. Attaques contre nos salaires, nos pensions, nos conditions de travail, notre protection sociale, frappant particulièrement les femmes… Les politiques qui attaquent les personnes issues de l’immigration, les chômeur.se.s et les malades servent d’écran de fumée pour tenter de nous frapper toustes plus durement.

    Ces attaques inédites seraient soi-disant “nécessaires” en raison du budget et des dettes publiques qui ont tellement augmenté parce que les gouvernements ont invariablement fait des cadeaux aux plus riches. Ce n’est pas notre crise, nous n’allons pas la payer !

    Le patronat n’attend pas la formation du gouvernement pour passer à l’offensive. Les travailleur.se.s sont mis.e.s à l’écart en permanence, et pas seulement dans les secteurs les plus touchés. Les emplois bien protégés et bien rémunérés cèdent la place à des emplois précaires. Les restructurations et l’austérité se succèdent à un rythme effréné. Plus personne n’est à l’abri. Les secteurs dans lesquels les investissements publics sont urgents, comme les soins de santé, les transports publics et l’éducation, subissent déjà les effets des coupes budgétaires. La lutte est nécessaire, sinon l’extrême droite jouera sur les frustrations et les mécontentements pour semer les divisions et la haine. Avec pour conséquence encore plus de misère et une défense encore plus brutale des intérêts des grands patrons – il suffit de regarder les États-Unis avec Trump et son BFF Elon Musk.

    Notre dossier

    https://fr.socialisme.be/97981/larizona-un-projet-brutal-contre-notre-classe-sociale-se-revolter-sorganiser-pour-gagner
    https://fr.socialisme.be/98015/attention-aux-voleurs-larizona-veut-nous-faire-les-poches
    https://fr.socialisme.be/98201/entretien-limitation-dans-le-temps-des-allocations-de-chomage-cest-au-systeme-economique-quil-faut-sen-prendre-pas-a-ses-victimes
    https://fr.socialisme.be/98041/alors-que-les-licenciements-collectifs-se-multiplient-la-chasse-aux-chomeur-euse-s-sintensifie
    https://fr.socialisme.be/98291/ce-nest-pas-en-chassant-les-malades-quil-y-en-aura-moins
    https://fr.socialisme.be/98153/de-wever-et-bouchez-veulent-me-faire-travailler-9-a-12-ans-de-plus-je-ne-tiendrai-pas-le-coup
    https://fr.socialisme.be/98096/luttons-pour-une-societe-qui-repose-sur-les-soins-aux-autres-pas-sur-les-profits
    https://fr.socialisme.be/98288/repoussons-la-menace-avec-un-plan-daction-et-la-construction-dun-mouvement-de-masse

    Tous nos articles ‘Arizona’

    Un plan d’action s’impose ! Les attaques ne sont pas symboliques, notre réponse ne doit pas l’être non plus

    La mobilisation des travailleur.se.s et de leurs syndicats est essentielle pour arrêter l’Arizona. Des journées d’action ponctuelles, comme celles prévues les 13 janvier et 13 février, peuvent sensibiliser à un problème particulier, mais il faut aller beaucoup plus loin. Nous manquons d’une stratégie pour organiser réellement notre lutte. L’approche actuelle des directions syndicales n’est pas à la hauteur des enjeux !

    Pour construire un mouvement plus large et de plus longue durée, nous avons besoin d’un plan d’action. Cela signifie un plan avec des actions connues suffisamment à l’avance et chaque fois en progression vers l’action suivante, en augmentant également la méthode d’action jusqu’à notre arme centrale de la grève générale avec laquelle nous mettons tout à plat – et répétons cela pour une période plus longue si nécessaire. Un tel plan d’action peut rassembler toutes les formes de résistance et de lutte, y compris par exemple la protestation de masse contre le génocide à Gaza, en un puissant mouvement. De cette manière, nous parvenons à des actions qui sont soutenues par l’ensemble de la société.

    On a vu en 2014 comment un plan d’action avec une concentration militante, une grande manifestation, des journées de grève provinciales et enfin une grève générale nationale ont fait trembler le gouvernement de droite Michel – De Wever. Ce mouvement a attiré des jeunes, des artistes, des indépendant.e.s, des agriculteur.trice.s et d’autres. Il a renforcé les syndicats, notre position dans l’opinion publique et a contribué à la percée du PTB, ce qui fait qu’aujourd’hui, des camarades syndicalistes et des activistes sont élus dans tous les parlements.

    Un deuxième plan d’action, plus dur et plus large, s’imposait alors, mais les directions syndicales ont été effrayées par notre force et se sont réfugiées aux tables de négociation où, finalement, rien n’a été obtenu. Le contrôle démocratique de notre lutte est essentiel pour éviter cela, surtout à un moment où les attaques sont plus dures qu’en 2014 et où notre résistance doit l’être aussi.

    Les assemblées du personnel, les réseaux de syndicalistes militants, la construction d’une solidarité active dans d’autres mouvements de protestation sont cruciaux pour cela. À Bruxelles, le collectif Commune Colère a pris l’initiative d’une  “assemblée de lutte” avec des syndicalistes de différents syndicats et secteurs, des militant.e.s féministes, antiracistes, écologiques… afin de préparer ensemble la lutte à venir. C’est une excellente initiative qui mérite d’être reproduite dans tout le pays !

    -> Prochaine Assemblée de Lutte à Bruxelles : 7 janvier, 18h30 au DK (rue de Danemark 70, St-Gilles)

    Le potentiel de lutte est là. La manifestation des secteurs de la santé et du secteur public du 7 novembre a été trois fois plus importante que prévu. La grève de l’enseignement francophone du 26 novembre a été très bien suivie. Même la manifestation contre la fermeture d’Audi en septembre a été importante, alors qu’il n’y avait pas de stratégie. Pendant ce temps, les grandes manifestations contre le génocide à Gaza ont rassemblé des dizaines de milliers de personnes. Nous pouvons renforcer notre solidarité en défilant avec nos collègues contre le génocide, ou en organisant des actions ciblées sur notre lieu de travail, comme le personnel soignant du CHU St Pierre qui a organisé une action de solidarité pour la Palestine sur une pause midi.

    Bref : mettons-nous ‘en mode lutte’ dès maintenant. Pas pour de simples actions ou marches symboliques, mais pour une lutte existentielle pour notre avenir !

    L’Arizona doit partir, un plan d’urgence sociale est nécessaire !

    Les plans de l’Arizona s’ajoutent à des années de déficits et de politiques néolibérales. Nous ne pouvons pas supporter de nouvelles coupes budgétaires ; au contraire, nous avons besoin d’investissements publics drastiques dans les services publics et les infrastructures. Les investissements dans les soins de santé, l’éducation et les transports publics doivent être à la hauteur des besoins. Pour contrer l’abandon des malades, la charge de travail doit être réduite et un meilleur équilibre entre travail et loisirs est nécessaire. Revendiquons une réduction collective du temps de travail pour un maximum de 32 heures par semaine, avec maintien du salaire et recrutement supplémentaire. L’Arizona veut faire le contraire en abolissant le RCC, en rendant le crédit-temps fin de carrière et les autres formes de diminution de travail moins attrayantes et en instaurant un système de malus pour les pensions. Nous disons : retraite à 65 ans maximum ! Préservons les RCC, le crédit-temps fin de carrière et le crédit-temps !

    Il vaut mieux ne pas laisser notre industrie aux actionnaires et aux PDG qui aujourd’hui jettent la main-d’œuvre à la poubelle et liquident le savoir-faire technique. Un défi tel qu’une sérieuse transition écologique tout en préservant les emplois (sans concessions sur les salaires et les conditions de travail) est clairement hors de portée des patrons et de leur soif de profit. Il faut un plan national public pour le maintien et le développement de la production industrielle et des emplois qui l’accompagnent. Les personnes qui travaillent dans ces secteurs et la population dans son ensemble sont les mieux placées pour déterminer les besoins, y compris un cadre de vie qui ne passe pas de l’inondation à l’ouragan et à l’incendie de forêt ; ce sont aussi les personnes qui savent le mieux comment tout produire.

    Bref, un plan d’urgence sociale est nécessaire. Nous ne l’obtiendrons pas en demandant gentiment, mais seulement en organisant sérieusement notre lutte ! Les assemblées du personnel, les assemblées générales et les réseaux d’activistes peuvent étoffer ce plan d’urgence et le lier aux revendications de notre lutte.

    Lutte révolutionnaire contre le système d’oppression et d’exploitation

    Lutter contre les attaques contre notre niveau de vie, nos conditions de travail et notre protection sociale signifie également défendre la lutte des militant.e.s pour le climat, des agriculteur.trice.s, des personnes sans papiers et de toustes celleux qui s’opposent à l’oppression (sexisme, racisme, LGBTQIA+phobie…). Une coordination est nécessaire entre les syndicats et les autres mouvements sociaux pour être plus forts ensemble.

    L’oppression est intrinsèquement liée à la logique capitaliste qui exige la division pour maintenir l’inégalité économique et sociale. Il faut un projet commun pour unir la classe travailleuse dans toute sa diversité dans la solidarité pour gagner la lutte contre chaque forme d’exploitation et d’oppression.

    Cette lutte ne s’arrête pas aux frontières, une solidarité internationale est nécessaire. La lutte des peuples palestinien et libanais contre la violence coloniale, impérialiste et capitaliste dont ils sont victimes est aussi la nôtre.

    Le capitalisme est une impasse de misère. Leur système est cassé et irréparable. Pour le bien de la majorité de la population et de la planète, il faut un autre système – une société socialiste dans laquelle nous prenons notre avenir en main. Travaillons dans ce sens, rejoignez le PSL !

    Abonnez-vous à Lutte Socialiste

    [leform id=’3′ name=’Abonnement’]
  • Le PTB dans des majorités communales, des positions à saisir pour organiser la résistance face à la droite

    C’était le tout dernier argument du PS: un vote pour le PTB, c’était un vote inutile puisqu’il refusait “de prendre ses responsabilités”. Maintenant ça y est, c’est fait, le PTB a “pris ses responsabilités”, au moins à Mons et à Forest au moment d’écrire ces lignes, en attendant Molenbeek et peut-être aussi Schaerbeek.

    Article tiré de l’édition de décembre-janvier de Lutte Socialiste

    On ne va pas trop s’attarder sur la colère noire de George-Louis Bouchez, mais ne boudons pas notre plaisir, ça faisait tout de même plaisir à voir. Après sa victoire électorale aux élections fédérales de juin, le MR imaginait pouvoir s’installer confortablement au pouvoir partout. À Mons et à Forest, le MR a été éjecté de la majorité malgré sa progression. De rage, le MR a imposé en représailles une clause anti-PTB dans l’accord provincial MR / PS / Engagés à Liège. Cet accord serait brisé en cas d’alliance avec le PTB dans l’une des communes liégeoises. Pour rester dans la majorité provinciale, le PS a dû accepter cette humiliation inédite dans l’histoire politique belge. Cela s’explique notamment par la situation des finances communales et la recherche désespérée de relais aux échelons de pouvoir capables de venir en aide aux localités.

    À Liège, donc, le PS s’est à nouveau allié à la droite dure, ce qui n’a pas empêché les banques de snober la ville ! Dans le cadre du plan régional Oxygène qui vise à assurer des prêts pour les villes et communes, la banque Belfius a accepté de prêter de l’argent à quatre grandes villes, mais pas à Charleroi, ni à Liège… ni à Mons. Et pour cette dernière, c’était une surprise, survenue à dix jours à peine de la conclusion de l’accord de majorité. Un hasard ? Pas vraiment. En prévision des élections régionales, Belfius avait déjà il y a quelque temps annoncé qu’elle couperait l’accès aux prêts à un éventuel gouvernement wallon comprenant le PTB. Le patron de la banque, Marc Raisière, fait par ailleurs partie de la “galaxie Bouchez” et est régulièrement consulté par le président du MR.

    Rupture ou accent?

    Ce ne sont que les premières indications de ce que la droite et le monde des affaires sont capables d’imposer par la force l’idée qu’il n’y a aucune alternative à la politique dominante. Écraser jusqu’à l’idée-même d’une alternative, c’était au cœur de la stratégie de la Commission européenne face à la Grèce quand le parti de gauche Syriza a pris la tête du gouvernement, jusqu’à sa capitulation face aux marchés.

    La situation ne sera pas simple pour effectivement imposer un changement de politique au niveau communal. Molenbeek fait ainsi partie des onze communes bruxelloises actuellement sous plan financier de la Région: en échange de cette aide régionale, les communes doivent appliquer une politique budgétaire stricte. Et c’est Molenbeek qui connait la situation la plus grave, avec un déficit de 9 millions d’euros l’an dernier.

    Commentant l’accord de majorité montois, le journaliste du Soir David Coppi soulignait que si le PTB parlait d’une politique de “rupture” pour entrer dans une majorité, il s’agit en réalité plutôt d’accents qui ne modifient pas l’orientation politique globale suivie ces dernières années. En Flandre, le PTB était déjà dans une majorité communale à Zelzate, et a imposé un impôt aux grandes entreprises implantées sur la commune. C’était une inclinaison différente – et positive – mais elle n’a pas fondamentalement changé la vie dans la commune. Aujourd’hui, le PTB a été dégagé de la majorité par son partenaire, Vooruit, après une légère perte de vitesse électorale sur place.

    La plus grande prise de responsabilité à respecter, c’est celle d’organiser la lutte. À trop vouloir être respectable et rester dans le carcan permis par les institutions, l’espoir d’un changement risque bien de pourrir et de devenir cynisme et frustration. C’est le terreau idéal pour la droite et son langage de mise en concurrence de la misère, où l’on oppose notamment les chômeur.euse.s aux travailleur.euse.s précaires en les convaincant qu’au final, ce sont les allocataires sociaux les responsables d’à peu près tout.

    La crise sociale que nous connaissons est déjà profonde. A Bruxelles, on s’attend à dépasser le nombre de 10.000 personnes sans abri. Les associations de terrain remarquent une augmentation de 20% tous les deux ans. Et ça, c’est avant l’avalanche de mesures antisociales qui nous fonce droit dessus. Il nous faudra nous battre pour défendre nos conquêtes sociales, la perspective d’en arracher de nouvelles renforcera ce combat, et très certainement aussi si nous répondons à la radicalisation de la droite en étant sans équivoque sur l’absolue urgence de renverser le système capitaliste pour instaurer une société qui mobilisera, et expropriera, toutes les capacités techniques nécessaires à la satisfaction des besoins de tou.te.s.

  • Commune Colère : assemblée de lutte contre la boucherie sociale annoncée

    “Pour ceux qui travaillent, il y aura plus de (salaire) net, mais pour le reste, ce ne sont que des réformes dans la sécurité sociale qui sont désagréables. Et il faudra continuer à pédaler en côte durant dix ans. Ça demande du courage.” Voici comment Bart De Wever annonce la reprise des négociations fédérales. Ce sera l’austérité à tous les étages et pour longtemps. La « supernota » qui a fuité dans la presse annonce par ailleurs le menu : allongement et déstructuration du temps de travail, généralisation des contrats “zéro heures” et des sous-statuts d’emploi, attaques sur l’index et sur le salaire brut, durcissement des emplois de fin de carrière, saccage des services publics et non marchands, privatisations, chasse aux malades, exclusion des allocations de chômage, recul voire abandon de la lutte contre le réchauffement climatique,… La liste des horreurs est longue.

    Appel de Commune Colère

    Avec les gouvernements les plus à droite que la Belgique ait connu depuis longtemps, patrons et actionnaires ne s’y sont pas trompés : c’est l’occasion rêvée de démanteler tout ce qui les empêche de faire payer la faillite de l’économie néolibérale aux travailleur.euse.s. Cette montée en puissance s’appuie aussi sur une attitude toujours plus conservatrice et autoritaire. Il faut s’attendre aussi à des attaques sur les droits syndicaux et le droit de manifester ou de faire grève. Sans oublier que derrière la violence d’État, les divisions semées par la droite et le désespoir politique et social se cache la montée d’idées et d’organisations d’extrême droite toujours plus fortes, toujours plus normalisées, en particulier par l’axe MR-NVA. Ces gouvernements nous mènent à la guerre. Leur complicité dans le génocide commis par Israel en Palestine est insupportable.

    Face à ce rouleau compresseur, pour certains c’est l’incrédulité, pour d’autres une forme de résignation devant la pénétration des propositions de droite parmi les travailleurs. Pourtant la meilleure façon de contrer cette dernière, c’est en se mettant en ordre de bataille ! Il faut apprendre des batailles précédentes, et en particulier du mouvement de 2014, mais il nous semble impossible de ne pas se préparer à résister à cette offensive sans précédent. Il y a urgence! Mettons-nous autour de la table pour identifier les bonnes pistes, se coordonner et renforcer les actions de nos organisations syndicales. Les liens avec toutes les composantes du mouvement social seront essentiels pour battre le gouvernement des patrons!

    Travailleur.euse.s, délégué.e.s syndicaux, militant.e.s féministes, antiracistes, associatives, écologistes, avec ou sans emploi, avec ou sans papiers,… ces gouvernements nous attaquent tou.te.s, répondons en construisant la résistance.

    Nous appelons donc à une assemblée de lutte contre la boucherie sociale annoncée. Rdv le 26 novembre 2024 à 18h30 au DK, Rue du Danemark 70b 1060 Saint-Gilles.

  • [Entretien] Limitation dans le temps des allocations de chômage: c’est au système économique qu’il faut s’en prendre, pas à ses victimes

    Dans le catalogue des horreurs que préparent De Wever, Bouchez et tous les partis de l’Arizona figure en bonne place la limitation dans le temps des allocations de chômage, un véritable “trophée de chasse” pour la droite. Nous en avons discuté avec Cédric Leterme, du GRESEA.

    Propos recueillis par Nicolas Croes

    Merci, Cédric, de nous accorder cet entretien. L’an dernier, tu avais écrit une carte blanche intitulée Limitation des allocations de chômage : où sont les profiteurs ? Tu y développais d’une part l’inefficacité des mesures de répression des chômeurs pour lutter contre le chômage et d’autre part qu’attaquer les chômeurs permet de faire diversion (et division) quant aux vrais profiteurs.

    Vooruit s’était pour la première fois déclaré en faveur de cette mesure, une nouveauté qui ne vient pas de nulle part : elle est dans la filiation du plan d’activation des chômeurs instauré en 2004 sous l’action du ministre Frank Vandenbroucke, très proche de l’actuel président du parti Conner Rousseau. Les Engagés ont également rejoint la cohorte à ce moment-là. Cette nouvelle configuration rendait très probable que ça arrive sur table après les élections.

    Par ailleurs, c’était clairement une manœuvre de diversion. Quand on parle de ça, on ne parle pas de ce qui est plus massif. C’est systématique depuis des décennies : pour ne pas parler de l’évasion fiscale, pour ne pas parler de l’inflation, pour ne pas parler de profits, on va parler chômeur et chômage de longue durée. C’est d’autant plus outrancier que la précédente attaque, en 2012, a limité dans le temps les allocations d’insertion et a rendu extraordinairement dégressives les autres allocations, puisque deux des trois planchers sont en dessous du seuil de pauvreté au-delà de la période maximum. C’est impossible de vivre correctement.

    Deux études ont fait le bilan des mesures de 2012, sans parvenir à de grandes surprises. On savait déjà qu’on ne crée pas d’emploi en punissant les chômeurs. Les chiffres montrent que la dégressivité et la limitation dans le temps des allocations d’insertion n’ont servi à rien. Ça n’a pas suscité de retour à l’emploi des personnes concernées, au contraire, ça a fait exploser la précarité et ça a accru la charge sur les CPAS. Mais parmi les personnes exclues du chômage, il n’y en a que la moitié qui arrivent ensuite au CPAS. Que deviennent les autres ? Alors, la droite parle de la toxicomanie, de la mendicité… Tout ça, ça a une source. À un moment donné, quand on coupe tout et que les gens passent même au travers du dernier filet de sécurité, ces personnes se retrouvent forcément quelque part. Il y a la solidarité intrafamiliale, les gens retournent chez eux, mais d’autres ont recourt au trafic. On perd la trace de ces personnes-là. Donc, même d’un point de vue de contrôle social, cette mesure est complètement absurde. La sécurité sociale, c’est aussi une manière de garder du lien.

    Les économies espérées sont ridicules. Ici, dans la note de De Wever, on espère économiser 1,8 milliard avec la limitation à 2 ans des allocations, en sachant que sur ce 1,8 milliard, il y a un milliard qui va être reporté sur les CPAS, dont 800 millions sur les communes. En gros, on vise à économiser 800 millions, des cacahouètes, en enfonçant des dizaines de milliers de personnes encore plus dans la misère et en aggravant les inégalités sociales et territoriales.

    Le gouvernement De Croo (avec participation du PS et d’ECOLO) a fixé cet objectif d’un taux d’emploi de 80 % en 2030, objectif repris aujourd’hui par les partis qui négocient la coalition Arizona. D’où vient ce chiffre ?

    De nulle part, ça n’a aucun sens. 80%, ça fait joli. Plus que 78% ou 82%. C’est tout. Dans ce taux d’emploi,  on compte le nombre de personnes qui ont eu un “travail rémunéré”  durant la semaine précédant l’enquête, y compris à temps partiel, en intérim, peu importe. Et peu importe aussi si ces emplois sont utiles ou nuisibles à la collectivité. On rapporte ensuite ce nombre à la « population en âge de travailler », en considérant que toutes les personnes entre 20 et 64 ans devraient logiquement avoir un emploi. Mais on a aujourd’hui un taux de chômage historiquement faible et, sur toute la population en âge de travailler, il y a plein de gens qui ont de bonnes raisons de ne pas être présents sur le marché du travail. Ces personnes sont malades, s’occupent de leur famille, se forment, etc. Beaucoup “travaillent”  donc, mais pas au sens du taux d’emploi.

    Par ailleurs, quand on rapporte notre taux d’emploi au nombre d’équivalents temps plein, on dresse une réalité différente. On nous parle d’un taux d’emploi magnifique en Hollande, qui frôle les 80%. Mais avec combien d’intérimaires et de contrats précaires ? Si la base du calcul repose sur les équivalents temps plein, la différence est marginale. De toute façon, ce n’est pas en punissant 100.000 chômeurs qu’on va atteindre ces 80% : il faudrait recaser 8 à 900.000 personnes absentes aujourd’hui du marché du travail pour des raisons diverses, en sachant qu’il y a 180.000 postes disponibles à l’heure actuelle.

    L’enjeu se situe donc ailleurs. Ce n’est pas innocent non plus qu’on en parle maintenant alors que la situation économique est morose et que les licenciements se succèdent.

    Oui, il faut s’attendre à ce que le taux de chômage explose et que les drames sociaux s’accumulent. Et on va de nouveau mettre la faute sur les premières victimes. Où faudrait-il recaser ces gens ? On ne nous chiffre jamais les emplois en pénurie. Oui, il y a des secteurs où il y a des tensions de recrutement. Pourquoi ? Notamment parce que les conditions de travail sont dégueulasses.

    Par contre, on ne parle pas de mesures beaucoup plus bénéfiques pour le taux d’emploi – à supposer que cet indicateur soit pertinent, ce qui est déjà discutable – comme la réduction collective du temps de travail. C’est une mesure qui a une efficacité prouvée bien plus élevée que de punir les gens.

    C’est très juste, et ça s’impose aussi face à la charge de travail. Dans tous les secteurs, les gens craquent. Ce type de revendication est au cœur de la bataille idéologique à mener contre la droite.

    Que le MR parvienne à se positionner comme parti du travail, c’est quand même incroyable. Leur première mesure au gouvernement wallon, c’est de supprimer les droits de succession. Ils parlent du mérite individuel et ils s’empressent de favoriser l’héritage et les nantis. Ils favorisent les actionnaires, qui sont quand même les premiers à ne pas travailler. C’est fabuleux.

    Ce monde-là ne parle que du travail dans une perspective marchande et capitaliste. Il faut un emploi, c’est-à-dire un travail qui paye, une façon d’avoir de l’argent, indépendamment des enjeux sociaux, indépendamment de la sécurité sociale, indépendamment du sens du travail et indépendamment de son utilité sociale. Et il faut surtout éviter que l’État ou les syndicats aillent à l’encontre de ce fonctionnement marchand du travail.

    Mais la gauche ne parle plus du travail, ou alors en parle selon les termes de la droite. C’est dramatique. J’ai lu une interview dans l’Echo de quelqu’un du PTB, on a absolument voulu lui faire dire qu’on a besoin des multinationales pour travailler, ce à quoi il a répondu oui, oui, effectivement, mais après il faut qu’elles payent leurs justes impôts. C’est un abandon complet d’accepter le “besoin”  de multinationales pour nous dire ce qu’on doit produire et comment le faire pour ensuite qu’elles en récupèrent un maximum en nous laissant éventuellement quelques miettes. Une fois que tu as accepté ça, le champ discursif idéologique est assez réduit. On a pourtant derrière nous une séquence historique, avec le covid et les inondations, qui aurait dû inviter à une remise en cause de notre fonctionnement, ne fut-ce que d’un point de vue écologique, pour réfléchir à une production mise au service de la collectivité et pas de quelques actionnaires. Mais les discours un peu radicaux étaient rares. Au contraire, c’est le MR qui a fini par imposer le nucléaire.

    Le renoncement à gauche en termes de réflexion un peu radicale sur l’économie est terrible. On a encore vu cela avec Audi, où le désert était complet en termes de solution et de perspective de lutte. On a quand même une histoire d’occupations d’entreprises en Belgique, qui remonte un peu, mais qui est réelle. On a aussi l’exemple de l’occupation et de la reconversion sous contrôle ouvrier de GKN en Italie et ça, c’est aujourd’hui. Et à aucun moment ça ne sort. Le PTB parle d’un moratoire sur les usines automobiles, on cherche des repreneurs, mais qui est-ce que ça fait rêver ça ? Qui y croit ?

    Il y a un fatalisme, une résignation. Il y a eu le résultat des urnes, c’est vrai. Mais on ne doit pas surinterpréter ça. Le discours de droite populiste est d’autant plus fort qu’il y a ce renoncement à gauche. Peu avant les élections, il y avait encore des sondages sur la popularité d’un impôt sur la fortune, tout ça n’a pas disparu. Les gens se rendent bien compte de la concentration obscène de richesses. Mais sans perspective stratégique collective, ça parait tellement énorme qu’on ne sait pas trop bien sur quoi agir. Tout parait inatteignable : nationalisation, socialisation… On n’arrive déjà pas à limiter la casse, alors pourquoi penser à aller plus loin ? Et donc, le truc concret sur lequel on pense avoir une prise, c’est le voisin qu’on soupçonne d’avoir 100 euros de plus.

    Pourtant, assumer la rupture, c’est exactement ce qu’il faut faire. L’échec vient souvent du manque d’audace. On doit avoir un projet qui parle à l’imagination, qui suscite de l’espoir, qui ne se contente pas de limiter la casse.

    Nous sommes au 80e anniversaire du Pacte social dont la Sécurité sociale est un pilier. On ne va pas manquer de commémorations insipides, autour de l’idée que tout le monde était d’accord. C’est faux, il y avait un rapport de force. Tout l’enjeu aujourd’hui est de ne pas défendre cette réalisation comme si c’était le maximum à obtenir. Il faut l’élargir, la prolonger, aller au-delà et dépasser la question de purs transferts financiers pour inclure la socialisation de la production et la sécurité d’existence des gens, avec le logement, l’alimentation, etc. Les patrons disent qu’ils ne sont pas contents avec cette sécurité sociale là, et bien nous aussi, on doit pouvoir dire haut et fort que c’est insuffisant et qu’on va se battre pour le faire valoir.

  • Le MR à droite toute, et ça continue !

    Depuis l’arrivée de Georges-Louis Bouchez à la présidence du MR, la ligne du parti n’a fait que s’infléchir du côté conservateur de la force. Adieu Reynders et Michel et leurs sourires de technocrates, bonjour langage simple et arguments douteux. Court retour sur la descente conservatrice d’un des descendants du plus vieux parti de Belgique. Charles Rogier en sueur !

    Par Verba (Liège)

    Un “outsider” au pouvoir depuis 20 ans

    Rappelons un fait pourtant simple, mais qui semble avoir été effacé par les outrages discursifs de Georges-Louis Bouchez (que nous appellerons ensuite Gloub par souci d’économie de signes) : le MR a été aux manettes depuis 20 ans au fédéral et faisait partie des derniers gouvernements wallons et de Fédération Wallonie-Bruxelles, aux côtés du PS.

    Pourtant, toute la campagne a été axée autour de “l’opposition” du MR à la politique du PS, auquel il a lui-même participé. Ce tour de passe-passe a été rendu possible par la particip-opposition de Gloub aux différents gouvernements : le parti participe effectivement aux différents gouvernements, mais son président n’a fait qu’attaquer ses partenaires et monter en épingle tous les prétextes pour saboter les différentes actions desdits gouvernements. La manœuvre a été empruntée à Elio Di Rupo qui était en son temps le champion de la particip-opposition.

    De cette façon, le MR s’est construit une figure médiatique d’envergure à l’aide des techniques rhétoriques de Trump : ce qu’on veut, c’est de la polémique partout, tout le temps. Et si en plus on récupère des éléments de langage issus du sarkozysme ou des sujets de campagne de l’extrême-droite, c’est encore mieux. Que les propos soient vrais ou cohérents n’a que peu d’importance : il faut se faire voir, se faire entendre. En Belgique comme ailleurs, cette brume de provocations et de “diviser pour régner” vise à brouiller la perception de la politique du parti pour ce qu’elle est : unilatéralement antisociale et pro-riches.

    Le ver était dans le fruit

    Au-delà des mots et des carabistouilles, on peut également se questionner sur la présence au sein du MR d’anciennes personnalités proches ou ayant fait partie de l’extrême-droite. On notera ainsi la présence de Marc Ysaye, rentré au MR avec tambours et trompettes sur fond d’accord idéologique avec Jordan Bardella ou Marine Lepen, ou encore de Georges-Pierre Tonnelier (ancien du FN belge), de Drieu Godefridi (passé depuis à la NVA, puis continuant son petit bonhomme de chemin de son côté) qu’on pourrait décrire comme un chantre indépendant du libertarianisme mâtiné d’une sympathie non dissimulée pour des figures telles que Zemmour, Trump ou Bolsonaro. Les conservateurs haut en couleurs ne manquent pas au sein du MR, y compris parmi les figures de premier plan comme Pierre-Yves Jeholet qui, en plein débat, a balancé à Nabil Boukili (PTB) à “Ne venez pas nous donner des leçons ici en Belgique. Si ça ne vous plaît pas, vous n’êtes pas obligé de rester en Belgique.”

    Ces gentils chantres de la liberté de discriminer ont l’assurance d’être défendus par leur président. Après tout, ce dernier ne se cache pas pour partager sur les réseaux sociaux du Fdesouche (média d’extrême-droite français), du Damien Rieu (ancien porte-parole du RN français), du Alessandra d’Angelo (rédactrice en chef de Pan.be, ancien journal satirique, nouveau média numérique tendance extrême droitière et ancienne attachée parlementaire du tristement célèbre Laurent Louis). Concernant les élections communales passées, qu’est-ce que Gloub comme une “étape d’une dangerosité sans précédent pour notre démocratie” ? L’arrivée de l’extrême droite au pouvoir à Ninove et à Ranst ? Non. La possible présence du PTB dans une majorité à Molenbeek.

    Importer les conflits, une seconde nature signé MR

    En quelques années, Gloub a effacé toutes les personnalités médiatiques du MR. On ne ressort les seconds couteux que pour importer d’ailleurs diverses paniques morales. Drieu Godefridi s’est fait le relais d’une vieille panique morale issue de l’alt-right américaine selon laquelle on ne pourrait plus souhaiter un joyeux Noël et que la gauche aurait détruit la fête. David Clarinval, alors qu’il était vice-Premier ministre, s’est chargé de la promotion en Belgique du pamphlet transphobe “Transmania” écrit par deux militantes transphobes françaises et publié chez Magnus, un éditeur d’extrême droite, où l’on peut lire que “L’idéologie transgenre et ses dérives ouvrent une brèche intéressante pour l’avancée des revendications pédophiles.” L’importation des paniques morales est au cœur de la méthode Bouchez. À chaque moment sa polémique.

    Le champ lexical employé est lourdement marqué par la droite sarkozyste : travaux d’intérêt général pour les personnes au chômage de longue durée, interdiction de la mendicité, discrimination à l’emploi pour les femmes voilées, etc. La filière d’import française bat son plein et les sources d’inspiration du MR ne sont même plus cachées : le groupe Bolloré, la rhétorique du RN et ses thèmes avec un petit supplément Trump. Les cinq prochaines années ont de quoi nous faire rêver. Il se murmurerait même que l’ancien protégé de Reynders aura son ministère rien qu’à lui dans le futur gouvernement Arizona : celui de la Sécurité. Tout un programme.

  • “De Wever et Bouchez veulent me faire travailler 9 à 12 ans de plus, je ne tiendrai pas le coup!”

    Pension à 67 ans ? Non merci! Témoignage d’un conducteur de train

    La note de De Wever pour la formation du gouvernement fédéral est de retour, avec quelques changements. Il a fallu attendre la fin des élections communales puisqu’aucun des partis qui négocient la coalition “Arizona” n’ait voulu se présenter face aux électeur.trices en défendant un projet si antisocial. Toute la classe travailleuse regarde ce catalogue des horreurs avec effroi, notamment les cheminot.e.s. Pour les conducteur.trice.s de train, c’est l’attaque contre leur système de retraite qui est la plus redoutée.

    Par un cheminot

    Un décalage horaire permanent

    Un.e cheminot.e qui a travaillé au moins 30 ans – aux heures les plus impossibles – peut prendre sa retraite au plus tôt à 55 ans.

    Il faut garder en tête que les horaires sont tous les jours différents. Parfois, vous commencez à 03h05, d’autres fois vous finissez à 01h35. Parfois, vous êtes dans une séquence avec, par exemple, uniquement des équipes “tôt” ou “tard”, mais il peut aussi y avoir des mélanges. Vous pouvez vous lever à deux heures moins le quart du matin, travailler jusqu’à midi et, le lendemain, pendant votre jour de repos, vous vous levez à 7 heures pour emmener vos enfants à l’école. Votre rythme est alors décalé de cinq bonnes heures. Plusieurs fois par semaine, vous souffrez d’un décalage horaire, un “jet lag”. Un rythme pareil durant des décennies, ça se paie en termes d’années de vie (en bonne santé). Mais en contrepartie, on bénéficie d’une retraite anticipée.

    Travailler jusqu’à 12 ans de plus

    Dans la nouvelle version de sa super note, De Wever propose de relever l’âge minimum de la retraite du personnel de la SNCB d’une demi-année chaque année à partir du 1er janvier 2026. Qu’est-ce que cela signifie concrètement? Tout dépend de l’âge et du nombre d’années de service roulant. Dans la pratique, beaucoup devront travailler jusqu’à 67 ans. En effet, à partir de 2049, l’âge légal de la retraite sera fixé à 67 ans.

    Prenons ma situation. Je ne pourrai pas partir en pension le 1er janvier 2037, comme convenu. À cette date, j’aurai 55 ans, mais l’âge minimum sera porté à 61 ans et continuera d’être progressivement repoussé. Je ne pourrais pas partir en pension avant le 1er janvier 2049 et je devrai donc travailler 12 ans de plus. À moins qu’il soit encore possible de démissionner après une carrière d’au moins 42 ans. Dans ce cas, je pourrai partir en 2046 et n’aurai à travailler “que” neuf ans de plus !

    Un dossier emblématique : nous ne tenons déjà plus le coup

    De nombreux.ses accompagnateur.trice.s et conducteur.trice.s ne peuvent déjà plus prendre leur retraite à 55 ans. Arrivé.e.s trop tard dans le service, il ne leur est possible de partir que peu de temps avant l’âge légal de la retraite. Un manager a déclaré à ce sujet à la mi-octobre que parmi celles et ceux qui ont 48 ans aujourd’hui, seule une minorité pourra partir en pension à 55 ans. D’autres commencent leur carrière assez jeunes, pour l’abandonner prématurément. D’autres encore doivent arrêter pour raisons médicales. Sur les 6.000 personnes concernées, combien finiront par prendre leur retraite à 55 ans sans tenir compte des projets de l’Arizona? Une minorité. La mesure ne représente donc pas grand-chose. Mais pour les partis de droite, il s’agit d’un dossier emblématique. La droite ne supporte pas nos droits de fin de carrière.

    Qui poursuivra une carrière complète dans ces professions? On constate déjà aujourd’hui qu’une grande partie des collègues arrête pour raisons médicales, ou de manière volontaire, tandis que certain.e.s décèdent dans leur soixantaine. C’est déjà un défi de tenir trente à trente-sept ans. Mais quarante-cinq ans à se lever à des heures impossibles, à arpenter les rails, à faire face aux agressions, aux collisions, aux heures de pointe et à d’autres sources de stress ? Les métiers du rail risquent de devenir des métiers que l’on n’exerce que pendant une courte période.

    Cerise sur le gâteau: la diminution du montant des pensions

    Comme si cela ne suffisait pas, le futur gouvernement veut aussi calculer les pensions des fonctionnaires de la même manière que celles des salarié.e.s du privé. Ces pensions sont parmi les plus basses d’Europe occidentale.

    Les fonctionnaires sont des privilégié.e.s, disent des parlementaires dont la pension est équivalente au triple du montant des pensions. Selon les critères belges, les fonctionnaires ont en effet des pensions élevées. Moi-même, je toucherai 2.179 euros par mois en 2037 (selon les règles actuelles). La vérité, c’est que ce ne sont pas ces pensions qui sont élevées, ce sont les pensions statutaires des employé.e.s qui sont beaucoup trop basses.

    L’attaque se ferait en adaptant le salaire de référence de quatre ans à finalement 40 ans en 2055 (ou 2049 selon la lecture de la note). En outre, en augmentant les conditions de carrière pour les services à partir du 1er janvier 2025 pour avoir droit à un montant de pension maximum. Cela signifie qu’il faudrait travailler plus longtemps pour un montant de pension plus faible.

    En outre, il y aura un plafonnement de l’indexation, alors qu’il n’y a pas de plafonnement de l’augmentation des prix. La péréquation liant les pensions aux barèmes salariaux devra également être supprimée. Même si les salaires n’ont pas augmenté dans les chemins de fer au cours des 22 dernières années, il s’agit d’un principe important.

    Si toutes ces mesures sont adoptées, de nombreuses personnes devront travailler beaucoup plus longtemps pour une pension beaucoup moins élevée.

    Un combat nécessaire

    Nous ne disposons que de très peu d’allié.e.s sur le plan politique. Conner Rousseau, par exemple, s’est prononcé à plusieurs reprises en faveur d’un relèvement de l’âge de la retraite du personnel de conduite. Les négociateurs du gouvernement n’ont pas trébuché sur ce point. A droite règne l’unanimité concernant la fragilisation de nos droits.

    Nous devrons donc compter principalement sur le rapport de forces sur le lieu de travail et dans la rue. Nous attendons avec impatience un plan d’action syndicale crescendo qui dépassera – de loin – celui de l’automne 2014.

0
    0
    Your Cart
    Your cart is emptyReturn to Shop